Affiche française
WILLARD 2003 | WILLARD | 2003
Affiche originale
WILLARD 2003 | WILLARD | 2003
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Willard 2003

Willard

Willard est un jeune homme timide, complexé, sans ami, qui vit avec une mère castratrice dans une vieille bâtisse. Ce qui n'est pas fait pour le désinhiber, c'est que sur son lieu de travail, personne ne le respecte et qu'il subit les brimades de son directeur, ayant autrefois arnaqué son père, aujourd'hui décédé, en lui piquant l'entreprise familiale. Mais un beau jour, il se lie d'amitié avec Socrate, un rat albinos trouvé dans son jardin et avec qui il arrive à communiquer et surtout qu'il peut commander. Bientôt, c'est une centaine de rongeurs que Willard a sous son contrôle et c'est alors le début de sa vengeance puisqu'il entend bien, à l'aide de cette armée de bestioles, rendre la monnaie de leur pièce à tous ceux qui l'ont humilié ...

WILLARD 2003 | WILLARD | 2003

Remake du "Willard" de Daniel Mann réalisé en 1971, Willard 2003 va donc, comme nombre de réadaptations avant lui, souffrir la comparaison avec son prédécesseur et c'est légitime. D'aucuns y verront une énième adaptation hollywoodienne inutile mais source de bénéfices, d'autres en revanche, pourront découvrir une agréable surprise qui remet au goût du jour un petit bijou horrifique assez méconnu, faute d'une distribution DVD suffisante.

Le nouveau traitement inspiré du roman "Ratman's notebooks" de Stephen Gilbert, reprend la même trame que son aïeul, à savoir : l'histoire de Willard Stiles, un taciturne jeune homme d'une trentaine d'années qui vit avec Henrietta, une mère impotente qui le martyrise verbalement et qui, à son travail, subit les humiliations quotidiennes de son patron, Monsieur Martin et l'indifférence de ses collègues, à l'exception de Cathryn. Parallèlement à cette pseudo histoire de cœur, Willard sympathise avec des rats sur qui il exerce un certain contrôle et notamment Socrate, baptisé ainsi en hommage au célèbre et ô combien perspicace philosophe grec. Les rongeurs vont alors lui servir d'armée vengeresse afin de faire payer tous ceux l'ayant rabaissé, avec en premier lieu Monsieur Martin, son détestable patron. Le seul grain de sable dans cette mécanique bien huilée en apparence est la présence de Ben, un énorme rat, avec qui il se bat pour le leadership de la horde de nuisibles et qu'il traite d'ailleurs comme son boss le fait avec lui, c'est-à-dire en essayant de le rabaisser en permanence. Faut-il alors y voir un transfert de la part du faible timoré incapable d'affronter les gens en face mais se sentant omnipotent vis-à-vis de rats ? Je vous laisse le soin de terminer vous-même cette analyse psychologique de comptoir et m'en vais plutôt vous dire comment j'ai trouvé cette reprise.

Ainsi, dans l'ensemble c'est la même chose, excepté l'épilogue concernant le personnage principal qui est quelque peu différent, mais que mon trop grand respect pour les lecteurs m'interdit de vous dévoiler. "Alors qu'est-ce qui change ?" me demanderez-vous les dents en avant prêts à me dévorer telle une troupe de rats vengeurs.

Déjà, ce "Willard" est le "bébé" de Glen Morgan un des meilleurs scénaristes de la série "X-files" et ayant notamment bossé sur "Destination finale". Il suit ici les traces d'Alfred Hitchcock et de Tim Burton pour un maximum d'effets que ce soit au niveau de la tension ou du visuel. Dès le début du long métrage, il laisse le film nous attiser, tout en nous suggérant qu'il y a clairement quelque chose de véreux qui va poindre. En effet, le ver semble déjà dans le fruit et n'attend qu'un événement déclencheur pour pouvoir tout dévorer. Et ce détonateur, ce sera la mort de Socrate. Dès lors, le comportement de Willard change. De grand timide presque maladif, il passe au chef d'armée sûr de lui, n'hésitant pas à être sadique envers ceux qui le méritent. Le réalisateur va ainsi nous gratifier de certaines scènes vraiment sublimes : l'apparition des rats comme les volatiles dans "Les oiseaux" du sieur Alfred, l'ultime visite au bureau du patron et surtout l'arrivée de l'ascenseur avec son véritable déferlement de rats. Mais tout ça, Glen Morgan le fait sans effet tape-à-l'œil, tout est amené en finesse. Ainsi, peu nombreuses mais diablement efficaces, sont les scènes du film où interviennent massivement les rats. Que ce soit les entraînements, les attaques ou bien le final très chaotique, elles sont visuellement magnifiques et terrifiantes à la fois. Ca a dû être un sacré boulot que de gérer et dresser toutes ces bestioles velues, même si avoir un ordinateur à portée de mains, ça aide !

Sont présents également dans ce métrage, de sympathiques moments de pure comédie noire. On pense notamment à : la scène où la mère de Willard, jugeant que son prénom ne fait pas assez viril, décide de l'appeler désormais Clark ou encore celle de l'attaque du chat (qui, clin d'œil sympa, s'appelle Scully, nom d'un célèbre agent spécial de la série "X-files") par une horde de rats déchainés.

La vielle demeure familiale et le lieu de travail de Willard apportent aussi du crédit au film de Morgan car ils représentent tous deux des décors à couper le souffle tant ils transparaissent un côté sombre et gothique. Ajoutons à cela que le style immobilier adopté est très élégant et qu'il dépareille en tous points du minimalisme de l'original où l'aspect psychologique semblait primer davantage.

Saluons par ailleurs, la direction photo, très soignée (le directeur n'est autre que Robert McLachlan, qui a travaillé sur la série "Millenium") exploitant magistralement les lentilles à courte focale, qui influent énormément sur les angles de prise de vue.

En ce qui concerne le score, notons que l'alchimie entre scènes d'action et moments plus mélodramatiques est très bien gérée par Shirley Walker (ayant officié également sur la trilogie "Destination finale" et disciple du grand Danny Elfman), que la chanson "Ben" (déjà présente dans la séquelle réalisée par Phil Karlson en 1972) de Michael Jackson fait partie de la bande originale et qu'elle est même reprise par Crispin Glover lors du générique de fin !

Ce qui change également, c'est le casting du film. Il n'y a peut-être pas au cinéma, d'acteurs avec un visage aussi étrange que celui de Crispin Glover. Il est tout bonnement effrayant en jeune refoulé totalement blafard. La tête d'affiche de Willard 2003 est probablement plus connue pour son rôle du père de Michael J. Fox dans la trilogie "Retour vers le futur" et pour celui du méchant dans "Charlie et ses drôles de dames", bien qu'il soit également célèbre pour son comportement insolite en dehors des caméras, mais cela ne nous regarde pas. En revanche, ce qui nous intéresse c'est son interprétation et là on peut dire qu'il nous gâte. Il est tellement spécial qu'il insuffle à la relation "Willard / les rats" une sorte d'énergie sexuelle perverse, ce qui rend le film parfois très dérangeant et contrebalance la performance plus timorée de Bruce Davison (qui, pour l'anecdote, apparaît dans ce remake sur les photos du défunt père) dans l'ancienne version. A l'instar d'un Anthony Perkins dans "Psychose", Crispin Glover est complètement habité par son rôle. Tantôt hystérique dans ses colères (sa voix brisée quand il hurle est un pur délice), tantôt émouvant dans ses supplications et par son côté "seul au monde", il est à la fois pathétique et proche de la folie que l'on voit surgir dans son regard. Pas la peine donc de s'embarrasser d'un acteur connu puisque que Crispin Glover porte tout le film sur ses frêles épaules, même si R. Lee Ermey (une "tronche", comme on dit dans le milieu du ciné, vue entre autres, dans "Seven" et "Fantômes contre fantômes") et Laura Elena Harring (révélée par "Mulholland Drive") dans les rôles respectifs du patron exécrable et de la collègue bienveillante s'en sortent assez bien et constituent des faire-valoir de bonne facture. Et ce, même si le cabotinage d'Ernest Borgnine, l'odieux Monsieur Martin dans la première version, était une pure merveille d'interprétation !

En conclusion, ce Willard demeure dans l'ensemble un très bon remake, même s'il pèche de temps à autre par excès de confiance car n'est pas Alfred Hitchcock qui veut et révèle ses lacunes sur certains aspects comme le rythme, le traitement elliptique de la relation se nouant entre Willard et Ben, étudiée trop rapidement à mon goût car cela aurait justifié davantage la violence finale. Toutefois, des scènes terriblement efficaces, un acteur convaincant (à la fois psychotique, imprévisible, inquiétant et touchant parfois au sein d'une même scène !), une ambiance gothique fortement servie par un visuel plus qu'à la hauteur font de ce film un divertissement plus qu'honnête qui n'a pas à rougir de son aîné que d'aucuns jugent, même s'il a vieilli, nettement meilleur, même s'il reste malheureusement inexploité à ce jour en DVD. Vous pouvez donc, pour vous consoler, louer celui-ci, vous avez ma bénédiction !

WILLARD 2003 | WILLARD | 2003
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Note
3
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Vincent Duménil