Merlin Lefrancq-Dubois
Et on continue notre série d'interviews d'auteurs et d'autrices croisé.es au Frissons Festival de Reims, avec Merlin Lefrancq-Dubois, qui va vous présenter son univers et ses œuvres !
* Salut Merlin. Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Salut ! Je suis un auteur et professeur de percussions de 27 ans, un touche-à-tout baignant dans les univers sombres et fantastiques depuis toujours. Étant petit, malgré mes six frères et sœurs, je préférais m’enfermer dans ma bulle pleine d’histoires toutes plus horribles les unes que les autres, et je crois que je n’en suis jamais totalement sorti !
* Quand t’es venue l’idée de devenir auteur ?
Je me souviens que c’était lors de mes 14 ans, lorsque je commençais à m’interroger sur mon avenir professionnel. Une fois apparue, cette idée fut une évidence.
* Pourquoi avoir choisi l’univers du fantastique, de l’horreur et du thriller noir ?
Allez savoir pourquoi, ces univers m’ont toujours fasciné. M’y plonger, que ce soit à travers l’art ou ma propre imagination, m’épanouit particulièrement, je dirais même que j’y trouve un côté rassurant. Peut-être parce que je suis conscient qu’il s’agit de fiction, ou bien que ça a un effet cathartique, devenant un moyen personnel de mieux supporter le monde réel.
* En matière de cinéma de genre, aurais-tu un petit « top 5 » à nous révéler et pourquoi ces choix ?
Voilà un choix particulièrement difficile ! Je vais donc en citer 5 parmi mes préférés en fonction de leurs différents critères :
- "Sinister" pour le malaise ambiant du film et son intrigue originale
- "Grave Encounters" car ce film est le plus effrayant que je connaisse, et la preuve que l’on peut faire beaucoup avec peu de moyens
- "Clown" pour tout ce que j’aime qui se retrouve condensé dedans (body horror, humour noire, originalité, gore et angoisse)
- "Chucky 2 - la poupée de sang", mon film doudou, celui qui m’a fait aimer les films d’horreur (valeur affective donc !)
- "La mouche", un film culte et du body horror trash qui est mon sous-genre préféré, un accord parfait !
* Idem au niveau de la littérature, quels sont tes auteurs favoris et tes livres de prédilections ?
Bien sûr, ma littérature de prédilection est en accord avec l’horreur ! Mes auteurs favoris dans le genre sont Christelle Colpaert-Soufflet, Mo Hayder et Bernard Minier, bien que ce dernier soit plus spécialisé dans le thriller. Concernant les livres, je peux en citer 5 :
- Jazzman de Sam Kujo, un livre qui m’a particulièrement touché et parlé
- Corpuscrit de Christelle Colpaert-Soufflet, une œuvre profondément viscérale
- Fétiches de Mo Hayder, avec son ambiance poisseuse qui nous colle à la peau
- Oracle de Stéphane Grünenwald, l’unique roman de son auteur et pourtant un chef-d’œuvre
- 2 sœurs de Bernard Minier, le meilleur de son auteur
Bonus : un roman qui n’est pas encore paru mais que j’ai bêta-lu, de Richard Erèbe. S’il était déjà sorti, il aurait remplacé 2 sœurs.
* En septembre 2022, tu publies ton premier ouvrage, Sujets Tabous. Peux-tu nous parler de ce premier livre et pourquoi avoir choisi l’auto-édition ?
L’idée m’est venue en 2011 lors de mes 14 ans : je voulais mettre en scène mon propre boogeyman, comme ceux des slashers que j’aime tant. Surtout que j’ai une écriture très cinématographique. J’ai d’abord écrit une première version en peu de temps que j’ai envoyée à des maisons d’édition, sans succès. Puis les années passant, je suis revenu dessus avec davantage de temps et de patience, mais aussi d’expérience grâce à mes études et aux écrits en parallèle.
J’ignorais l’existence de l’auto-édition jusqu’à ce que je communique avec des auteurs sur Instagram. J’ai été séduit par l’autonomie et la totale maîtrise de son ouvrage qu’offre cette méthode de publication. Et après plus de 2 ans d’expérience, je n’éprouve pas l’envie de me faire éditer, l’auto-édition me satisfait pleinement.
* En 2023, tu sors Sujets Tabous 2. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’écrire une suite à ton premier livre ? Savais-tu dès le départ que cette histoire serait en deux tomes ?
Au départ, mon idée était d’écrire une trilogie : durant ma jeunesse, j’étais fasciné par les nombreuses suites aux sagas des slashers et je voulais copier ce modèle. Avec le recul, je me suis dit que je ne voulais pas faire une histoire à rallonge au risque de dissuader les lecteurs et/ou de me lasser moi-même, alors j’ai tout condensé en une duologie. En tout cas, l’intégralité de l’histoire ne m’a pas quitté depuis 2011, année où se place l’intrigue par ailleurs, comme un clin d’œil à mes débuts d'activité d’auteur. Quand j’en aurais les moyens, je compte sortir une intégrale regroupant les deux tomes. J’ai également un projet de roman dans lequel on retrouverait les principaux protagonistes de la duologie.
* A notre (triste) époque, il faut faire attention à tout ce qu’on dit dorénavant. Toi-même, y a-t-il des sujets tabous que tu refuserais de mettre en scène dans tes romans, histoire de ne pas être la cible des bien-pensants, ou tu ne te refuses rien ?
Davantage par limite personnelle que peur de devenir une cible, je préfère ne pas mettre ou du moins détailler des agressions sexuelles. Outre cela, je ne me refuse rien. Cela ne m’empêche pas de craindre un petit peu d'éventuels retours véhéments ou agressifs, mais je surmonte plutôt bien cela.
* J’aime beaucoup la couverture de Brouillard, ton troisième ouvrage. De quoi parle-t-il ?
Merci beaucoup pour le compliment, je dois ce magnifique travail à ma compagne ! Il s’agit d’un roman qui s’éloigne du slasher pour se tourner vers une histoire plus fantastique avec du surnaturel, bien qu’un mystérieux tueur se cache parmi les protagonistes. On y suit un couple lesbien qui se rend à la gare pour prendre leur train quotidien, constatant par la même occasion que de nombreux inhabitués sont présents. Un accident va contraindre tout le monde à chercher de l’aide, mais ils vont découvrir qu’un brouillard étrange les entoure et vont faire face à des événements inexplicables et mortels. Avec ce roman, j’ai voulu implicitement dénoncer le comportement égoïste de l’humain qui le mène bien souvent à sa perte.
* As-tu un rituel particulier quand tu te mets à écrire ? (avec de la musique, la nuit, autre…)
J’ai la chance de pouvoir écrire partout, dans n’importe quelle situation. Il me suffit juste d’avoir le temps, l’envie et l’imagination. Ce n’est pas toujours simple de réunir ces trois critères ! Mais ils sont les seuls nécessaires pour que je me mette à rédiger. Après, j’aime beaucoup écrire en musique, pour m’imprégner d’une certaine ambiance ou bien visualiser les scènes que je compte écrire. Et je suis plus souvent productif en soirée.
* Ton nouvel ouvrage est sorti en 2024 et s’intitule Passions Morbides ! Rien que le titre donne envie. Tu nous en dis plus ?
Avec ce roman, je suis parti sur quelque chose d’encore différent, d’autant plus qu’il s’agissait d’une envie que je ne m’explique pas et qui s’est révélée être un sacré défi : concilier romance et horreur, soit mon genre de prédilection et celui qui me plait le moins en littérature. Je dois être un grand romantique dans le fond ! Plus sérieusement, je pense que l’amour, qui est un sentiment extrêmement fort, peut faire des ravages s’il est perturbé par des éléments extérieurs, et c’est précisément ce qui arrive dans cet ouvrage. On y découvre deux adolescents, amis d’enfance perdus de vue, qui se retrouvent à une période sombre de leur vie, où chacun adopte un comportement autodestructeur. Le garçon est masochiste et la fille développe une obsession pour les couteaux. Ça ne sera pas joli à voir.
* Tu es venu au Frissons Festival de Reims, et tu fais aussi d’autres salons littéraires. Quel effet ça fait de rencontrer tes lecteurs, d’avoir des retours positifs sur tes œuvres ?
C’est toujours une expérience extrêmement enrichissante et valorisante. Écrire, de mon point de vue, ça doit d’abord nous plaire soi avant d’être lu par les autres, cependant l’avis des lecteurs, même s’il est négatif tant qu’il est constructif, offre une énergie non négligeable dans la création littéraire, d’autant plus que l’auto-édition demande plus de travail et d’investissement.
* Pour quelqu’un qui ne te connaît pas, par lequel de tes livres lui conseillerais-tu de débuter et pourquoi ce choix ?
Il m’est déjà arrivé de devoir conseiller un livre pour commencer : mon choix se porte dans ce cas sur Brouillard, car c’est un one-shot et qu’il bénéficie d’une plume que j’espère plus mature, comme il s’agit de mon troisième roman. De plus, le genre est un peu moins ciblé qu’un slasher ou une romance horrifique. Mais le premier tome de Sujets Tabous et bien aussi, si l’on aime les slashers et les thrillers, d’autant plus qu’on y découvre de nombreux protagonistes importants pour les romans à paraître.
* Je vois que tu es batteur et prof de percussions. Je suis moi-même batteur dans un groupe de rock. Est-ce que le fait d’être batteur, de devoir maîtriser le tempo, t’apportes quelque chose au niveau de l’écriture, notamment au niveau du « rythme » de tes histoire par exemple ?
Il ne me semble pas que ma pratique instrumentale ait un rôle dans mon écriture, à moins que je ne m’en sois pas rendu compte. Toutefois, la musique est un élément important de ma vie, ce qui explique certainement pourquoi j’en écoute énormément et qu’elle me permet d’imaginer plus facilement certaines scènes que j’écris. De plus, il est question d’un groupe de musique dans Sujets Tabous et il sera développé par la suite.
* D’après ce que j’ai compris sans avoir lu aucun de tes livres (ça viendra, promis !), tu as développé ce que tu appelles toi-même le « Merl’ImMonde », une sorte d’univers parallèle au nôtre et dans lequel on retrouve certains personnages dans chacun de tes romans. Il y a aussi un fil rouge apparemment dans chacun de tes livres, en la personne de « l’homme en blanc ». C’est très intrigant. Tu peux nous expliquer ça ?
Effectivement, le Merl’imMonde est un univers entier et complexe, fortement similaire au nôtre, ce qui me permet de faire un parallèle avec notre monde réel, en montrer ses tristes travers. L’homme en blanc, qui porte son nom à cause de son costume trois-pièces, ses accessoires et son morphsuit intégralement blanc, est un personnage qui consacre sa vie et son énergie à faire le mal, tout en protégeant ses arrières, simplement parce qu’il aime ça. Il justifie et excuse ses actes par son égoïsme qu’il dit être purement humain. Jusque là, il est le seul personnage à être apparu dans chaque histoire jusqu’à présent, j’ai préparé un véritable jeu de piste pour que les lecteurs puissent essayer de deviner son identité avant la révélation qui se fera très tardivement. Toutefois, chaque roman peut se lire indépendamment, j’y ai veillé afin de ne pas obliger les lecteurs à tout lire.
Les romans, mais aussi les nouvelles ! Je tiens à ce que chaque écrit, ce qui inclut donc les nouvelles présentes dans divers recueils (à ce jour, une seule de mes nouvelles est présente dans le Recueil de Sang, projet participatif réunissant 14 auteurs différents autour du thème Slasher), raconte une facette de ce Merl’imMonde.
Finalement, cet univers diégétique est un peu comme une partie de moi, de ma bulle, que je désirais montrer au public afin de partager avec lui un moment de frisson et de plaisir.
* Comment se passent les rencontres avec d’autres auteurs ou autrices ? Est-ce que l’univers de la littérature de genre est un monde cruel, dans lequel on se dit bonjour par devant et on assène un coup de couteau dans le dos par la suite ou est-ce qu’il y a vraiment une entente cordiale entre les auteurs/autrices, avec des conseils donnés etc… ?
Cette question me rappelle mon premier salon du livre : j’étais extrêmement stressé (ce qui n’est pas nouveau), d’autant plus que j’allais me retrouver entouré d’autres auteurs horrifiques. Mon voisin le plus proche Frédéric Livyns m’a tout de suite mis à l’aise, s’est intéressé à mon travail, m’a donné des conseils et a même amené des lecteurs à lui vers mon stand. Mes deux acolytes de l’autre côté n’ont fait que s’amuser et m’entraîner parfois dans leurs délires. Cette belle entente se retrouve très régulièrement. Je crois même que le fait d’écrire de l’horreur nous rapproche davantage car nous sommes peu nombreux, mais aussi car tout le mal se trouve dans nos livres, comme s’il ne nous restait plus que la bonté et la bonne humeur par la suite. Il y a des exceptions, certes, mais les auteurs de romans d’horreur forment une véritable famille bienveillante et c’est toujours un plaisir de se retrouver !
* Un nouveau roman en cours d’écriture à venir ?
C’est un plaisir de répondre un grand oui ! L’intrigue se placera en 2012, toujours dans le Merl’imMonde bien entendu. Sans trop en dévoiler à l’heure actuelle, je peux dire que ce roman sera fantastique, gore, et impliquera des enfants et des clowns. Un joli programme haut en couleurs, surtout en rouge… En parallèle, je travaille également sur un recueil de nouvelles, chacune raconterait une histoire tragique ou horrible associée à un objet différent.
* Que peut-on te souhaiter pour le futur ?
De continuer à avoir des tas d’idées pour vous offrir toujours plus d’histoires à n’en plus dormir la nuit !
MERCI A MERLIN POUR SES REPONSES !
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