Affiche française
FURIA | FURIA | 2000
Affiche originale
FURIA | FURIA | 2000
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Furia

Furia

Dans un futur proche mais indéterminé, une ville a été ravagée par la guerre. Dans cette région imaginaire où le pouvoir est aux mains d'un régime dictatorial, la liberté d'expression est inexistante et sanctionnée par la torture voire la mort. Ainsi, l'armée et la police sillonnent les rues nuit et jour afin de traquer tout citoyen armé de velléités artistiques. Théo, un rebelle de vingt ans sort toutes les nuits dessiner en cachette sur les murs des ruelles désertes pour exprimer ses sentiments. Un soir, il rencontre Elia, une jeune fille qui, elle aussi, a la passion du dessin rupestre et nocturne. Ensemble, ils vont devoir affronter ce pouvoir despotique oppressant. Arriveront-ils à vivre leur amour librement ?

FURIA | FURIA | 2000

Alexandre Aja, que l'on ne présente plus, nous dévoile déjà avec cette première œuvre, un style assuré, livrant un paysage apocalyptique clairsemé avec un talent artistique approprié et indéniable. La photographie et les décors font penser à ceux de "Mad Max" mêlés à ceux de "Peut-être" de Klapisch, et c'est là que le bât blesse, car de la dernière œuvre citée, le film d'Aja emprunte les principaux défauts, à savoir : une très faible exploitation du monde futur, excepté pour le décorum et surtout, plus gênant, la platitude du scénario.

En effet, ici le monde futuriste porté à l'écran est inexploité, dans le sens où aucune référence aux tenants et aboutissants de l'état actuel des choses dans cette contrée indéterminée, n'est faite à un moment donné du film. Qui est à la tête de l'Etat ? Comment le conflit dont il est fait mention est-il survenu ? Ces questions sont laissées en suspens et cela n'aurait pas été dérangeant dans un film de la qualité de "1984", mais dans "Furia", cet oubli est dommageable car il fallait au moins cet apport de détails pour combler la faiblesse du script.

Si je résume brièvement, le film raconte l'histoire d'une société reconstruite après la guerre où le gouvernement interdit toute manifestation de liberté et traquant, par le biais d'une milice armée et menaçante, toutes les volontés artistiques de ses citoyens. Un simple graffiti est donc un grave délit qui peut conduire à la mort. Mais voilà, le jeune Théo, un rebelle, brave cet interdit toutes les nuits après le couvre-feu, afin d'exposer son art devenu subversif sur les murs de la ville, nettoyés régulièrement par les miliciens à la solde de l'Etat totalitaire. Par dessins interposés représentant leur propre visage, Théo et Elia, taggers nocturnes, se rencontrent et vont tomber amoureux l'un de l'autre. Donc en gros, c'est l'histoire d'une société où les racailles qui dessinent sur les murs (tu parles de délinquants !) sont torturés et tués, le tout saupoudré de romance ? Waouh, c'est très impressionnant ! Bon j'exagère un peu car j'oublie que dans la majorité de ce genre de films, le "happy end" n'est pas forcément au rendez-vous. Tout n'est donc pas obligatoirement rose. En tout cas sur la pellicule, ça fait un peu sourire et on a du mal à y croire. Pourtant, "Furia" est adapté de la nouvelle "Graffiti" de Julio Cortazar (un réfugié argentin qui est venu à Paris, à l'époque où 30 000 citoyens rebelles avaient disparu), auteur également de la nouvelle inspirant "Blow up" de Michelangelo Antonioni. Un monsieur qui a fait donc ses preuves. Mais bon, ici, ce n'est qu'une adaptation et l'écrit est rarement égalé à l'écran, on sait bien que très peu de films dont le script est tiré d'un roman ont été des réussites, à part peut-être "Le nom de la rose" et "Shining" (quoique détesté par Stephen King !)…

Certes, le discours du métrage est très noble puisqu'il se veut être une sorte de brûlot relatif à la liberté d'opinion et un message à caractère pamphlétaire contre le pouvoir politique en place qui essaie par tous moyens d'empêcher ses concitoyens de trop s'exprimer. On est donc là très proche des idées d'Orwell ("1984") mais aussi du cinéma controversé donnant à réfléchir d'un Costa-Gavras ("L'aveu", "Z", pour ne citer que les plus connus), mais bon tout cela a déjà été fait et vu maintes fois et en mieux, alors que peut nous apporter Furia ?

On a déjà parlé plus haut du talent d'Aja pour diriger un film et également de la très belle photographie, largement soutenue par la qualité des décors. Sachez que Furia a été tourné à El Jadida, un petit village au sud de Casablanca, au Maroc. Ce décor naturel apporte un côté très réaliste au film : fortes chaleurs, bâtisses délabrées, on sent que ça transpire et ce côté authentique est très intéressant tout en n'ayant, finalement, pas coûté grand-chose. Aja nous prouve donc qu'on n'a pas besoin de décors hallucinants et de budgets pharaoniques pour montrer qu'on sait tenir une caméra et restituer à l'écran, une certaine ambiance.

Côté acteurs, ceux-ci sont corrects, sans non plus crever l'écran : Stanislas Merhar qui interprète Théo, rebelle la nuit puis jeune homme suivant les traces de son père le jour en tant que restaurateur et Marion Cotillard, égale à elle-même, forment un joli petit couple. Pierre Vaneck, qui joue Aaron, le père qui ne voit plus qu'en monochrome parce qu'il a dessiné sur les murs étant plus jeune (c'est sa sanction pour avoir voulu aller contre la volonté de l'Etat) n'est pas trop mal en homme désabusé qui semble avoir perdu tout sentiment de révolte contre le système et enfin, Wadeck Stanczak (Laurence, le frère de Théo travaillant pour le gouvernement, sans que l'on connaisse la nature exacte de son emploi), que l'on n'avait pas revu depuis longtemps nous livre là une assez bonne prestation dans le rôle du frère torturé assumant sa fonction jusqu'au bout. Toutefois, il y a quand même un truc énervant, c'est la lenteur et ce, même chez les acteurs, qui sont assez bons, certes, mais qui jouent comme dans un long-métrage d'Eric Rohmer, c'est à dire avec beaucoup d'hésitation. Tout cela saborde le rythme qui en devient sinusoïdal, autrement dit haché. Ajoutons à cela la présence d'interminables longueurs et de ralentis intempestifs hautement dispensables mais fortement perturbateurs et le premier opus d'Aja s'en trouve largement mutilé.

La musique, quant à elle, est de bonne facture et s'accorde bien avec le rythme du métrage et à son ambiance tantôt glauque, tantôt fataliste. Il faut dire aussi que c'est Brian May qui s'y colle et que le gars est une pointure en la matière puisque figurez-vous que le guitariste de Queen a composé les bandes-originales de "Flesh Gordon" et "Highlander" et écrit quelques musiques additionnelles sur les scores de "Wayne's World" et "Peter's friends". Ce n'est donc pas le premier venu !

Combinant romance, anticipation et parabole politique dans sa première œuvre, Aja, nous a assurément détaillé un monde coloré avec de bien belles images. Mais l'histoire est quand même assez superficielle car pas très originale ni très élaborée. Toutefois, c'est surtout la lenteur du film et le manque de scènes d'action intenses qui viennent tout gâcher. On aurait également souhaité plus de références quant à la guerre et au gouvernement contre lequel les rebelles luttent. Le conflit entre les deux frères qui n'auraient pas pu être plus différents (le rebelle contre le milicien) aurait aussi mérité d'être creusé plus en profondeur au lieu de laisser une place trop importante aux autres protagonistes du film et à la relation amoureuse entre Théo et Elia. Furia est donc un film frustrant en ce sens où il donne l'impression qu'il aurait pu être plus approfondi. Heureusement, le fils d'Alexandre Arcady à la ville, allait largement se rattraper par la suite avec un excellent "Haute tension" et un très bon remake de "La colline a des yeux". Ainsi, le premier Aja mérite un tant soit peu d'être vu car on sent que malgré des maladresses de débutant, il a du potentiel, ce que viendront confirmer ses petits frères sur pellicule.

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Note
3
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Vincent Duménil