BARBAQUE

BARBAQUE

Un couple de bouchers voit leur commerce péricliter, tout comme leur vie intime qui commence à se ternir. Un jour, une bande de militants vegans s’en prennent à leur boutique mais Vincent ne va pas se laisser faire et va tuer accidentellement l’un d’eux devant sa femme Sophie. Afin de cacher le corps, notre meurtrier va le transformer en jambon que sa compagne va vendre par erreur… Et c’est un véritable succès : tout le quartier réclame cette viande extraordinaire ! En cette période financièrement compliquée, ce phénomène semble tomber à pic…

BARBAQUE | BARBAQUE | 2021

L'AVIS:

Quatrième film de Fabrice Eboué (après "Case départ", "Le crocodile du Botswanga" et "Coexister"), "Barbaque" est clairement celui qui nous intéresse le plus à horreur.com dans la filmographie de l’humoriste-acteur-réalisateur. Pour cause, ce dernier traite du cannibalisme, met en scène un couple de tueurs en série et rappelle d’ailleurs un certain "Les bouchers verts", film danois d’Anders Thomas Jensen sorti en 2003, soit presque 20 ans après le film français dont il est question ici. Impossible en effet de ne pas penser à cette comédie noire dont Fabrice Eboué s’est très probablement inspiré ici.

Les films de cannibales, cela nous connait à horreur.com mais pas de jungle et d’indigènes ici : nous sommes en plein milieu urbain (avec un peu de rural quand-même pour les chasses à l’homme, histoire de moins se faire repérer…) et surtout dans une comédie noire. Exit les "Cannibal holocaust", "Cannibal ferox" et autres bisseries transalpines et place à une comédie française ayant pas mal fait parler d’elle.

En effet, le film de Fabrice Eloué a été très médiatisé (on en parlait sur les chaînes publiques, sur France Info et on le voyait passer dans certains festivals comme le grand Sitges ou encore L’Etrange Festival), grâce notamment au nom de son réalisateur et à son pitch qui avait de quoi émoustiller le Grand Public (peut-être un peu moins les fantasticophiles que nous sommes pour la plupart mais nous laissions toutefois traîner nos oreilles derrière les premiers échos).
Hé oui, le cannibalisme dégoûte mais intrigue/fascine/attire également, en témoigne un certain "Grave" de Julia Ducournau (que nous ne présentons plus) qui, après une énorme tournée en festivals, a su se faire connaître de bon nombre de cinéphiles et notamment certains n’approchant que très rarement le cinéma de genre.

Et même si nous ne rions pas non plus aux éclats devant "Barbaque", force est de constater que cette histoire, assez simple sur le papier, fonctionne plutôt bien et nous amuse assez souvent. Nous prenons en effet beaucoup de plaisir à suivre ce couple passé de simples bouchers de quartier à des serials killers faisant fructifier le capital de leur établissement en laissant derrière eux de nombreux cadavres transformés en jambons, travers, sautés et autres saucisses pour leurs fidèles clients venus en masse déguster cette viande sans équivalent sur le marché.

Et même si nous pourrons reprocher au scénario de rapidement tourner en rond et de devenir un brin répétitif (les meurtres se succèdent et les bouchers font et refont des découpes pour leur clientèle…), les quelques péripéties bienvenues (plus ou moins prévisibles toutefois) sauront nous maintenir en haleine jusqu’au final quelque peu soudain il faut le reconnaître également (je n’en dirai pas plus). Bref, une histoire qui ne casse pas trois pattes à un canard mais qui fait le job et nous fait passer un agréable moment grâce à cet humour noir omniprésent (et c’est si rare dans les comédies françaises d’aujourd’hui dont les très bonnes surprises se comptent sur les doigts d’une seule main chaque année).

Bon, il faut bien dire aussi que l’une des thématiques abordées (le veganisme est au cœur du métrage, au même titre que le cannibalisme) est d’actualité et cela est à prendre en compte dans le petit succès du film sur le territoire. Enfin, le duo d’acteurs principaux n’est pas en reste et participe grandement à la petite réussite du film.

Car outre un Fabrice Eboué himself dans le rôle de Vincent le boucher, nous avons à ses côtés une Marina Foïs (la grande amie de Jean-Paul Rouve, Maurice Barthélémy, Pierre-François Martin-Laval et Alain Chabat que l’on a pu voir dans tant de films comme "La tour Montparnasse infernale", "Casque bleu", "Trafic d’influence", "Le raid", "Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre", "Bienvenue au gîte", "RRRrrrr !!!", "Darling", "Boule et Bill", "Le grand bain"…) en grande forme.

A eux deux, ils forment un duo amusant, maladroit mais déterminé et prêt à tout pour sauver leur commerce et leur couple. Et même si l’idée (partie d’un meurtre accidentel) vient de Vincent, c’est bel et bien sa femme Sophie qui tire les ficelles et pousse son mari à faire empirer la situation et à se transformer en l’un de ces serials killers dont elle écoute les méfaits dans son émission télé préférée axée sur ces barbares sanguinaires (on retrouve d’ailleurs Christophe Hondelatte dans une version parodique de « Faites entrer l’accusé »). Un rapport de force qui semble parfois vouloir s’inverser mais non : on en revient presque toujours à une Sophie forte et véritable tête pensante décisionnaire dans notre binôme de tueurs en série tandis que Vincent joue plus le rôle du bon soldat, celui qui se tape la sale besogne (meurtre, découpage et transformation du corps) même si ses sauts d’humeur font bien souvent mouche auprès d’un public friand de gags, d’humour noir et de situations prêtant à sourire.

Et nos serials killers en herbe ne font pas dans la dentelle et ont un protocole bien huilé : la cible idéale est l’homme vegan, bien grassouillet (pour donner une viande persillée plus savoureuse forcément !) et surtout en pleine forme (ne surtout pas stresser la proie ou choisir une personne anxieuse au risque de donner de la viande dure et moins appréciable malheureux !). Nous suivons donc notre duo de tueurs dans le milieu des militants vegan, se joignant à leurs manifestations/rassemblements où cherchant à les rallier en faisant de la propagande en faveur du veganisme dans la rue. La suite est toujours la même : suivre la proie choisie, l’exécuter loin des regards et ramener le corps à la boucherie familiale. On s’amusera notamment devant un passage où l’on compare Vincent à de nombreux prédateurs terrestres/aquatiques animaux, mimant ces derniers au moment d’attaquer ses malheureuses proies.

Et que dire de nos vegan, cibles privilégiées de nos deux bouchers tueurs ? Des personnages parfois hauts en couleurs (le vegan transgenre, qualifié de graal par notre duo de tueurs, vaut par exemple son pesant de cacahuètes et la course-poursuite avec ce dernier demeurera l’un des meilleurs moments du film, tout comme la mise à mort de l’homosexuel pratiquant du yoga en plein air), sacrément perchés pour certains (on retiendra le savoureux moment où le « gendre » de Vincent et Sophie les remballe à tours de bras lors de chaque plat d’un repas de famille qui tourne au cauchemar éveillé pour les hôtes).

Alors oui, encore une fois on dira que le film devient répétitif dans sa seconde période mais on continue malgré tout à prendre un malin plaisir à voir notre duo Eboué/Foïs s’attaquer sans répit à la population vegan de leur ville, sans que cela ne semble perturber l’un des gendarmes de la ville mis sur l’enquête mais qui semble bien plus intéressé par la viande de vegan de Vincent et Sophie que par ce mystère qui entoure la disparition de toutes ces personnes. Encore un personnage amusant qui ne manquera pas de vous faire sourire de par son manque indéniable de professionnalisme et son désintérêt vis-à-vis de l’enquête.

Et l’humour noir et trash n’en finit plus au fil des nouvelles proies de notre duo de tueurs : du vegan toujours bien évidemment mais on s’en prend à des gros, des noirs, des homosexuels, des transgenres et on en vient même à parler de juif et de petit enfant… Et les pieds, mains ou encore pénis coupés volent dans les seaux quand ce n’est pas dans la bouche du clébard !
Et que tu sois pro-vegan ou au contraire amateur de viandes et ami des bouchers, tu y trouveras ton compte car Fabrice Eboué tape aussi bien sur l’un que sur l’autre comme il prend partie aussi bien pour l’un que pour l’autre (au moins il ne se mettra personne à dos, malin le gaillard).

Fabrice Eboué aime la comédie et les serials killers (il est d’ailleurs un très grand fan du film "C’est arrivé près de chez vous") : son film "Barbaque" est donc un projet qui lui tenait à cœur et ce dernier est dans l’ensemble plutôt réussi. Drôle et moqueur sur bien des courants de pensées, son film est un vrai condensé d’humour noir qui vous fera passer un agréable moment.
Dommage cependant que le film tourne rapidement en rond dans sa seconde partie mais la diversité des « proies » de notre duo de tueurs fait que l’on parvient à contrer ce petit manque de rythme et d’originalité grâce à l’apport de nouveaux personnages parfois hauts en couleurs. Et n’oublions surtout pas ce duo Eboué/Foïs qui fonctionne très bien.
De l’humour noir de ce type, j’en redemande et encore plus quand c’est français comme ici tiens !

BARBAQUE | BARBAQUE | 2021
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Bande-annonce
Note
4
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David Maurice