Action mutante

Accion mutante

Dans le futur, la Société ne s’intéresse qu’aux personnes favorisées et marginalise les autres (handicapés, étrangers...). Un groupe de personnes handicapées nommé « Action Mutante » commet des attentats et autres actes terroristes pour faire valoir les droits des personnes handicapées.

Mais voilà, depuis que leur leader Ramon est incarcéré, ce groupuscule rate chacun de ses projets qu’il entreprend (kidnapping finissant par l’étouffement de la victime, 50kg d’explosifs qui sautent une fois qu’il n’y a plus personne...).
Cinq ans plus tard, Ramon est libéré de prison et compte bien remettre son collectif sur les bons rails, en commençant notamment par un gros coup : perpétrer une tuerie lors du mariage de la fille d’un riche industriel et ensuite la kidnapper pour demander une importante rançon ! Malheureusement, tout ne va pas se passer comme prévu et Ramon va vite comprendre que son plan est parsemé d’embûches, la faute notamment à ses acolytes (tous plus bêtes les uns que les autres) et à ses fourberies qui vont être dévoilées au grand jour...

ACTION MUTANTE | ACCION MUTANTE | 1993

L'AVIS :

"Action mutante", "le jour de la bête", "mes chers voisins", "le crime farpait", "crimes à Oxford", "balada triste", "les sorcières de Zugarramurdi", "800 balles", "el bar"... Qui n’a jamais entendu parler d’Alex de la Iglesia ? Ce réalisateur phare des années 90 et 2000 dans le cinéma espagnol, qu’il soit fantastique ou non.

Le natif de Bilbao a débuté dans les long-métrages avec un film intitulé "action mutante" ("accion mutante" en Espagne), une oeuvre phare de sa filmographie, financée par un Pedro Almodovar alors agréablement surpris par son premier et unique court-métrage intitulé "mirindas asesinas". Un film qui ira chercher notamment 6 nominations aux Goya (l’équivalent des César français), deux ans avant "le jour de la bête" qui enfoncera le clou avec notamment le Goya du Meilleur Réalisateur et le Grand Prix du Festival de Gérardmer en 1996 (festival qui lui rendra d’ailleurs un hommage lors de sa 25ème édition).

Une chose est sûre et le constat se fait dès les premières minutes du film : "action mutante" montre déjà l’une des grandes marques de fabrique de son réalisateur, l’humour noire.
Difficile en effet de rester de marbre face à ce petit monument de la comédie fantastique tellement Alex de la Iglesia saupoudre son scénario de situations rocambolesques, balance des dialogues crétins à tout va et nous présente des personnages tous plus tarés les uns que les autres. Le tout baignant dans un humour noir dévastateur où tout le monde y passe (les handicapés bien entendu, mais également les juifs, les homosexuels, les pauvres mineurs et même un enfant vivant sous le toit de parfaits obsédés...).
Satyrique et anticonformiste à souhait, "action mutante" ne fait pas dans la dentelle et nous propose un véritable défilé de bêtises en tout genre !

La galerie des personnages confirme déjà à elle-seule la débilité addictive de ce qui va suivre ! Avec son groupuscule « Action Mutante » formé de frères siamois jamais d’accord, un cul-de-jatte volant dans les airs et dont la poitrine est reliée à 5kg d’explosifs, un mécanicien niais aux allures de grand dadet, un sourd et muet de naissance possédant l’un des QI les plus bas du Monde mais une force herculéenne et un bossu juif franc-maçon communiste et homosexuel (si si !), on imagine bien que ce pauvre Ramon (chef de cette troupe de bras cassés) va avoir des tuiles tout au long du film !
Mais ceci est sans compter les autres personnages que nous découvrons au fur et à mesure que nous avancions dans le film ! Vous y croiserez en effet un riche industriel fier et prêt à tout pour venger sa fille avec son crétin de gendre, une famille de rednecks du futur à la libido gonflée à bloc, un journaliste culotté et un brin suicidaire, une jeune femme délirante et atteinte du syndrome de Stockholm après avoir été la victime d’une explosion, et même une vilaine bestiole sanguinaire servant d’animal de compagnie à nos handicapés révolutionnaires!

Un gros bordel donc dans cette galerie de personnages hauts en couleurs qui vont pour certains apprendre à cohabiter, pour d’autres s’entretuer, mais une chose est sûre tout ce beau monde (si on exempte ceux morts entretemps) se retrouvera dans un final pétaradant dans lequel chacun viendra exposer ses motivations à coups de révolvers, fusils et autres armes futuristes !

Car oui, « action mutante » c’est aussi un défilé de scènes d’action qui viennent donner du punch à cette oeuvre totalement barrée ! Un rythme effréné qui ravira sans peine le public friand de tueries, attaques sauvages et fusillades (sous fond de musiques entraînantes) car le film d’Alex de la Iglesia en est truffé !
Ajoutez à cela des péripéties en veux-tu en voilà dans lesquelles notre « pauvre » Ramon (oui c’est le grand méchant du film dirons-nous mais, sans pour autant éprouver de compassion pour cet homme machiavélique, il faut bien avouer qu’il lui arrive quand-même pas mal de malheurs) semble sauter à pieds joints. Un chef de file qui va s’enfoncer tous les jours un peu plus (Etre aux commandes d’une tuerie et d’un kidnapping qui ont failli tourner au vinaigre avec la mort de deux compères / Etre contraint de tuer un par un les membres de son groupuscule car il a compris que ces derniers le soupçonnent de garder la quasi totalité de la rançon du kidnapping / Se retrouver piégé chez une famille de tarés / Finir dans un bar miteux dans la montagne avec des malades de la gâchette...), pour le plus grand plaisir d’un public désireux de voir ce véritable enfoiré se faire rattraper par une Justice ayant plusieurs cordes à son arc.

Péripéties invraisemblables et situations grandguignolesques s’enchaînent à une vitesse folle, donnant au film d’Alex de la Iglesia ce dynamisme fort appréciable qui évite les temps morts et autres séquences narratives trop blablateuses.
Se dessinent au fur et à mesure que nous avançons dans l’histoire des interactions multiples entre les personnages et ce puzzle narratif présentant jusque-là des pièces éparpillées un peu partout finit par se dessiner et prendre forme dans un dernier acte sous forme de pétarades et de bagarres de bar où tout le monde se met sur la gueule ! (je n’en dirai pas plus)

Les dialogues parfois débiles, les phrases rentre-dedans (« On se fout de nous alors on va botter des culs ! », « On était des rebus de l’hosto ! »...) et les réactions disproportionnées de certains personnages (le gendre du riche industriel qui fait le beau devant les caméras de journalistes curieux, imperturbables et culottés filmant la scène du paiement de la rançon sans se soucier de la gravité et de la dangerosité de la situation / le père de famille prêt à tout pour se taper la belle captive...) rendent le métrage encore plus déjanté et encore plus addictif pour celles et ceux qui comme moi raffolent de cinéma décalé.

Les environnements divers et variés (les bas-fonds d’une ville sombre et lugubre faisant penser à Gotham City ou le New York dans lequel atterrissait l’ami Jason dans un certain 8ème volet de la saga des "vendredi 13" / une salle des fêtes pleine à craquer / un vaisseau spatial avec ses sas et ses appareillages / des paysages désertiques vallonnés sur une autre planète / un bar miteux où grouillent des dizaines de mineurs...) apportent également un sympathique petit plus à ce projet ambitieux, et ce malgré la faiblesse du budget pour mettre à l’époque sous pellicule cette aventure assurément pas comme les autres !

Même si nous pourrons regretter deux-trois effets spéciaux risibles (ce qui donne toutefois du charme à cette série B décapante), quelques incohérences scénaristiques (le riche industriel qui fait exploser le vaisseau du groupuscule « Action Mutante » au risque de tuer sa fille kidnappée / la facilité pour Ramon et sa captive d’échapper aux griffes de la famille de rednecks dégénérés alors que tout semblait mal barré...) ou encore le fait que certains membres de « Action Mutante » ne soient pas suffisamment exploités, la faute à leurs décès prématurés dans le film (le grand naïf à la force surhumaine ou le juif bossu homosexuel et communiste notamment), il est difficile, pour qui aime ce genre de cinéma barré, décomplexé et assumé, de trouver de grands défauts à cette petite pépite mêlant fantastique et humour noir avec brio.

Totalement décalé, anticonformiste à souhait, "action mutante" séduira les amateurs de comédies fantastiques. Alex de la Iglesia avait réussi son entrée dans le cinéma fantastique et confirmera deux ans plus tard avec son étonnant "le jour de la bête".
Un film à voir et à revoir sans modération !

ACTION MUTANTE | ACCION MUTANTE | 1993
ACTION MUTANTE | ACCION MUTANTE | 1993
ACTION MUTANTE | ACCION MUTANTE | 1993
Note
5
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David Maurice