Affiche française
Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967
Affiche originale
Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967
Un film de
Scénario
Date de sortie
Couleur ?
non
Musique de

Fin août à l'hôtel ozone

Konec srpna v Hotelu Ozon

Parmi les neuf survivantes d’une catastrophe nucléaire, seule l’une d’entre elles est suffisamment âgée pour avoir connu l’ancien monde. Elles arpentent des terres complètement dépeuplées, se nourrissant de boîtes de conserves et cherchant des hommes pour se reproduire. Elles découvrent un hôtel délabré ou survit un vieil homme avec un gramophone…

Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967

L'AVIS :

"Mad Max réalisé par Andrei Tarkovsky", tel est l'expression utilisée par la cinémathèque américaine pour décrire Fin Août à l'Hôtel Ozone de Jan Schmidt, projeté lors d'un hommage au scénariste Pavel Jurácek. Le film date de 1967 et se veut être dans la mouvance des films de science-fiction post-apocalyptique. Un genre très apprécié des fans et assez protéiforme dans son approche et sa mise en image en fonction des pays et des réalisateurs. Approche plutôt réaliste aux USA avec, dès les années 50, des films tels "Cinq Survivants" (1951), "Le Dernier Rivage" (1959), "Le Monde, la Chair et le Diable" (1959), approche plus festive et guerrière en Italie avec "Les Nouveaux Barbares" (1982), "2019 après la chute de New York" (1983), "2020 Texas Gladiators" (1983) ou "Les Rats de Manhattan" (1984) entre autres. En France, on trouve aussi du film post-apo avec "Malevil" (1981) ou "Le Dernier Combat" (1983) par exemple. L'Australie nous a offert le célèbre "Mad Max 2", un fleuron du genre post-apo / action. La liste étant bien trop longue pour être énumérée ici, attardons-nous donc sur "Fin Août à l'Hôtel Ozone", qui, lui, provient de Tchécoslovaquie.

Là, tout de suite, et vu l'affiche originale présentée ci-dessus, vous avez compris qu'on ne va pas jouer dans la même catégorie que le cinéma bis italien, qui plus quand Tarkovsky a été cité. Vous l'aurez compris, le film post-apo de Jan Schmidt va être bien différent de ce qu'on a l'habitude de voir dans le genre, ce qui en fait un film intéressant pour son approche épurée, contemplative et profondément pessimiste. Filmé dans un somptueux noir et blanc, "Fin Août à l'Hôtel Ozone" déstabilisera le spectateur non averti de par son inaction, quand, à contrario, il envoûtera celui qui se laissera porter par ses images, son atmosphère, ses interprètes. Après une introduction en langage multiple, nous faisant comprendre que la majorité des pays ayant l'arme nucléaire a enclenché le compte à rebours pour lancer des missiles, on se retrouve plusieurs années après l'holocauste nucléaire, sans que le temps qui a passé depuis la fin du monde ne soit vraiment précisé. Aucune indication de lieu n'est proposé au public, qui reste donc dans l'expectative et ne peux que plonger dans le récit à la suite des personnages principaux, à savoir huit jeunes filles d'une vingtaine d'années environ et une dame nettement plus âgée, la seule qui a connu le "monde d'avant", et qui a un rôle de leader pour le groupe. Sans aucun artifice ni recherche du spectaculaire, le réalisateur nous donne donc à suivre ce groupe de neuf personnes tel que se déroulerait une vie après un holocauste nucléaire qui aurait décimé la majorité des habitants de la Terre.

Durant les quarante-cinq premières minutes, on se contente d'être avec ces femmes, qui marchent sans but réel (si ce n'est celui de trouver une présence humaine dans ces paysages désertés, un homme si possible, histoire de pouvoir commencer à repeupler la Terre...), qui ne savent pas quoi ni où chercher, qui n'ont jamais rien connu d'autre que la désolation, l'errance, la survie, la nourriture des boites de conserves et les souvenirs de la femme âgée. Un petit groupe qui semble soudé, malgré quelques frictions de temps à autre, et qui peut faire preuve d'une certaine violence, ne connaissant pas les notions de Bien ou de Mal. Ces jeunes filles sont en effet vierges de toute notion morale, d'une vraie éducation, de vraies valeurs. Seul compte la survie dans ce monde hostile. Cela se traduit par une certaine méchanceté envers les animaux, voire même une certaine cruauté et trois scènes risquent de choquer le spectateur puisque je pense que ces trois séquences ne bénéficient pas d'effets-spéciaux, ou au moins deux d'entre-elles. A la manière des films de cannibales italiens dans lesquels on trouve de vraies mises à mort d'animaux, Fin Août à l'Hôtel Ozone nous en propose également, comme ce serpent qui verra sa tête faire des 360° ou cette vache qui se fera tirer dessus puis se fait ensuite dépecée et éviscérée, dans le but d'obtenir de la nourriture cette fois, ce qui se révèle plus compréhensible, du moins du point de vu de l'histoire. La scène d'agression sur un chien est sûrement la plus choquante, j'espère qu'elle est truquée mais je n'en suis pas sûr. Ou alors, le chien est particulièrement bien dressé et sait faire le mort à la seconde près. Des scènes cruelles donc, filmées sans complaisance pourtant, se déroulant juste "comme ça", parce que ce nouveau monde veut ça. Des bêtes avec des bêtes. La condition humaine a régressé à l'état primitif, animal.

Au bout de quarante-cinq minutes, le film prend une nouvelle tournure avec l'arrivée d'un vieil homme, qui vit seul depuis des années dans un hôtel abandonné et délabré, le fameux hôtel Ozone du titre. Les filles découvrent donc ce qu'est un homme, n'en ayant jamais vu auparavant. Le film se poursuit avec son rythme lancinant, nous montre cette rencontre sans fioriture, offre une fort jolie scène dans laquelle le vieil homme sort son plus beau trésor, un gramophone et son unique disque. Un apaisement qui ne sera que de courte durée, le décès de leur leader décidant les filles à quitter l'hôtel Ozone pour repartir à la découverte du monde, toujours à la recherche de potentiels survivants masculins. Et c'est là où le pessimisme affiché tout au long du film va prendre tout son sens, avec ce final nihiliste au possible qui vient (peut-être) stopper tout espoir de renouveau, je vous laisse le découvrir. Le dernier plan du film, montrant les huit jeunes filles s'en allant vers d'autres horizons, m'a fait penser à la Mort entraînant les personnages du film Le Septième Sceau de Bergman dans une farandole de la mort, l'aspect dansant en moins. Un voyage vers l'inéluctable ?

"Fin Août à l'Hôtel Ozone", sans être réellement difficile d'accès, offre donc au spectateur curieux un récit avant tout visuel et sensitif, dénué de rebondissements ou de rythme, à la beauté plastique certaine et ce, durant 77 minutes. Une autre approche du cinéma de S-F post-apocalyptique, façon film d'auteur pourrait-on dire ici, qui n'est évidemment pas dénué d'intérêt pour tout amateur du genre.

Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967
Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967
Fin août à l'hôtel ozone | Konec srpna v Hotelu Ozon | 1967

* Disponible en DVD chez -> MALAVIDA BONUS :
- Josef Kilián court-métrage de Jan Schmidt et Pavel Jurácek (1964 -38 mn - VOSTF)
- Livret 12 pages : Texte et analyses de Jean-Gaspard Pálenícek
https://www.malavidafilms.com/dvd-fin-aout-a-l%E2%80%99hotel-ozone-sort…

Note
3
Average: 3 (1 vote)
Stéphane Erbisti