Affiche française
WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005
Affiche originale
WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005
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Wolf creek

Wolf creek

Ben, Liz et Kristy, trois amis, décident de partir pour trois semaines de trekking au cœur du bush australien, et d'aller admirer entre autres le site de Wolf Creek, lieu où se trouve un gigantesque cratère causé par une météorite et vieux de plusieurs milliers d'années. Mais cette nuit-là, au moment de repartir leur voiture refuse de démarrer. Heureusement, un autochtone de passage leur propose de l'aide, et remorque leur voiture jusque chez lui tard dans la nuit. La soirée se termine tous ensemble autour d'un bon feu, juste avant que tout le monde ne se couche pour envisager sereinement les dispositions à prendre pour le lendemain. Mais la journée sera longue, très longue…

WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005

Survival's not dead. Et surtout pas en Australie où le genre fut régulièrement plébiscité depuis des décennies, à l'instar de "Mad Max" pour ne citer que celui-ci. Greg McLean signe ici son premier film et quel film ! Afin d'apprécier au mieux Wolf Creek, il convient de se souvenir qu'un survival ne véhicule pas spécialement des litres de sang ; l'essentiel résidant surtout dans l'impact physique et psychologique du propos exercé sur nous, spectateurs. Et à ce petit jeu, le film tient la route, celle qui mène à réfléchir une fois de plus sur la nature humaine.

Pour introduire son propos, le réalisateur nous convie à Broome, petite bourgade australienne où nos trois amis se préparent pour le grand voyage qui durera trois semaines. Une occasion de s'approcher d'eux dans un premier temps et de s'apercevoir combien ils sont sympathiques, heureux et matures. Ils sont beaux, jeunes et méritent de découvrir la vie, qui passe à ce moment précis par cette aventure à trois, ce road-movie dans lequel nous embarquons nous aussi. Des vies gâchées par un destin qui s'avèrera bien cruel. Et là, le mal est fait : car la grande force du film dès le début est de nous immerger totalement, de faire des trois comparses nos amis. A défaut de pouvoir le vivre, nous devenons voyeur malgré nous sans intention de les quitter.

Le long périple qui mène au cratère de Wolf Creek est alors l'occasion de découvrir une photographie sublime entièrement dévouée aux paysages du bush australien. Le décor devient dès lors un personnage à part entière, préfigurant des évènements à venir. La caméra joue avec le ciel : immaculé de bleu, rouge chatoyant à la tombée de la nuit, noir de menace au bout du périple. Le Paradis, l'Enfer et le Purgatoire.

Arrivés à bon port, et la découverte du cratère, les montres s'arrêtent, la pluie tombe sans discontinuer. Un instantané déstabilisant qui nous plonge alors dans l'obscurité de la voiture en leur compagnie. Le cadre est serré, éclairé par des torches, pour mieux les étouffer, et nous étouffer. Surgit alors "la providence", tous feux braqués sur leur voiture.
Et c'est l'apparition de Mick, un autochtone disposé à leur prêter main forte pour les dépanner. La bonhomie du personnage est déconcertante puisque l'on devine ce qu'elle dissimule. Il est sympa Mick, il fait rire nos trois amis autour d'un feu de camp, alternant les anecdotes amusantes et d'autres plus écoeurantes à propos de son ex-boulot de chasseur, n'omettant surtout pas de bien rentrer dans les détails concernant les techniques d'abattage.
Nous en sommes à la moitié du film, et non ce n'est pas trop long : un survival se doit d'avoir une exposition des personnages et des lieux pour mieux nous retenir prisonnier du récit. L'heure est donc venue de basculer. En perte de repères, l'action s'enchaîne là où nous ne savons que peu de choses, si ce n'est qu'il s'agit de l'antre du bourreau. Ne vous attendez pas à des effluves de sang, car la terreur sait aussi se distiller autrement. Mick joue avec les trois jeunes gens comme un chat avec une souris. Un coup de griffe, une envolée et la victime retombe : abasourdie et blessée mais surtout pas morte. La panique dans les yeux de ses "jouets" devient son excitation.

Nous devenons complice de tout cela et le réalisateur tient ce qu'il voulait. Car "jouer n'est pas perdu", et nous laisse donc espérer sans cesse une possible échappatoire pour les trois jeunes gens. Car en plus d'être avenant, notre psychopathe a su retenir toutes les ficelles de son ancien métier dont on devine la cruauté avec laquelle il devait l'exercer. Le sadisme est poussé avec jusqu'au-boutisme : il se fait chirurgien de la torture physique mais aussi mentale, dont une scène n'est pas sans rappeler les techniques de chasse à courre : éreinter l'animal jusqu'à pouvoir l'approcher et enfin l'achever.

Alors certes, techniquement les scènes sont minimalistes, mais psychologiquement et visuellement très éprouvantes. En simple spectateur, dire que j'ai souffert n'est pas un vain mot, le "mérite" en revenant à un scénario construit et très bien écrit, mais aussi et surtout à son casting impressionnant de justesse. John "Mick" Jarratt ("Pique-nique à Hanging Rock") est un très grand acteur, et sa composition de bushman psychopathe fait réellement froid dans le dos. Quant à Nathan Phillips ("Des serpents dans l'avion") et ses deux partenaires féminines, leurs rôles respectifs sont un pur régal : très loin des clichés d'ados dégénérés, ils sont matures et le prouvent jusque dans la douleur : à aucun moment l'un d'entre eux ne devient une victime résignée à son sort ; ils restent dignes devant l'horreur qu'ils subissent et le font savoir à leur tortionnaire, tant verbalement que physiquement. Ils réussissent en quelque sorte l'intolérable : faire de l'agonie une douleur acceptable.

Soulignons enfin la réalisation de Greg Mc Lean (dont c'est le premier long métrage) qui nous implique et nous rend complice malgré nous ; les références évidentes à "Massacre à la tronçonneuse" pour l'ambiance et le toucher craspec des lieux, ainsi que "Le projet Blair Witch". On frissonnera d'autant plus également, en sachant que tous les indices parsemés dans le film sont en rapport avec le dossier réel d'Ivan Milat, psychopathe australien "oeuvrant" dans les années 90 et coupables de 7 meurtres de touristes.

Wolf Creek ne révolutionne pas le survival (ce que ne prétend pas non plus son réalisateur), mais s'inscrit comme un digne héritier de ses prédécesseurs, et restera à coup sûr une référence pour le début de ce 21e siècle : un sentiment saignant qui n'en finit pas de couler.
Et comme le dit Kristy, la veille de leur départ : "J'ai l'impression de quitter le paradis".

WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005
WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005
WOLF CREEK | WOLF CREEK | 2005

Wolf Creek faisait partie de la sélection de la Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes en 2005, et concourrait également pour la Caméra d'Or récompensant une première oeuvre.
Film également présenté au Festival de Sundance et à Gerardmer en 2006.

John Jarrat a reçu le Prix du Jury pour son rôle au Festival du film fantastique d'Austin au USA.

Note
5
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Christophe Jakubowicz