Monde de John – Le

John and the hole

John ressemble à tous les collégiens de son âge : c’est un élève lambda qui pratique le tennis, et aime jouer aux jeux vidéo en ligne avec son meilleur ami. En famille aussi, il se sent bien : sa sœur aimante laisse couler pas mal de choses alors qu’il peut être insupportable avec elle, son père lui offre des cadeaux chers et lui pardonne lorsqu’il les casse, alors que sa mère, est également très attentive et bienveillante à son égard. Un jour, John découvre, par hasard, un vieux bunker au fond du jardin familial. Contre toute attente, il décide d’y descendre sa sœur et ses parents après les avoir endormis...

Monde de John – Le  | John and the hole | 2021

L'AVIS :

A première vue, le scénario de Le monde de John (dont le titre original « John and the hole » est beaucoup plus évocateur…) est plutôt attrayant avec l’histoire de cet adolescent de treize ans qui drogue ses parents et sa grande sœur avant de les descendre au fond d'un trou inextricable en apparence. Les premières scènes sont d'ailleurs encourageantes avec : une réalisation hyper léchée, un adolescent bizarre rappelant les plus étranges vus au cinéma depuis "Le village des damnés" jusqu’aux films de Michael Haneke ("Benny’s video" mais surtout "Funny games") avec une ambiance baroque et anxiogène à la fois. La première demi-heure nous happe ainsi jusqu’au générique venant sur le tard et l’on se dit alors qu’on a affaire-là à un bon thriller psychologique !

Pourtant, une fois la famille au fond du gouffre, l'intrigue fait du surplace et ne propose rien d’un tant soit peu intéressant voire de surprenant. Au lieu de cela, on voit un gosse qui joue au grand en conduisant la voiture du paternel, en retirant de l’argent au distributeur du coin et en s’achetant tout ce qu’il veut (surtout de la nourriture) tout en continuant à pratiquer son tennis, à s’adonner aux jeux vidéo avec son meilleur ami avec lequel il adore également jouer à se noyer ! Et là, parce que l’on commence à s’ennuyer devant ce métrage aux scènes répétitives voire superflues mais sophistiqué car à la photographie digne de ceux de Terence Malick, on en vient à se questionner sur ses nombreuses incohérences. En effet, comment un gamin aussi frêle a-t-il pu descendre trois adultes dans un trou et ce, même avec des cordes ? Pourquoi personne ne s’interroge davantage sur la disparition des dites personnes, notamment la police ? Un agent viendra même interroger John, constatera une potentielle disparition de la famille, mais ne fera aucune fouille des environs, se contentant juste de l'alibi donné par l'enfant pouvant être démenti d’un rapide coup de fil ! Pourquoi également, la famille ne tente-t-elle pas plusieurs fois de sortir du trou alors qu’il ne semble pas si profond que cela ? Honnêtement, on a l’impression qu’il ne reste même pas un mètre quand les deux parents et la sœur se font la courte échelle ! Peut-être à cause de la mère qui reste assise pour s’y prendre ! On se demande alors si c’est voulu que tous les adultes soient complètement stupides dans ce film !?

Comme si toutes ces absurdités ne suffisaient pas, le metteur en scène n’a rien trouvé de mieux que de greffer une histoire parallèle à celle de John et dans laquelle une jeune fille d’une dizaine d’années environ semble être abandonnée par sa mère, même si ce n’est pas très clair. Mais que vient faire ce récit ici et surtout, qu’apporte-t-il à l’ensemble de l’œuvre de Pascual Sisto jusque-là réalisateur de courts-métrages ? Probablement rien, pourtant, son scénariste n’était pas un jeune débutant puisqu’il s’agit de Nicolas Giacobone ayant également officié sur les très bons Biutiful et Birdman !

La seule chose très réussie pour moi, c’est le choix de Charlie Shotwell (vu également dans "Morbius") dans le rôle principal car il nous est bien difficile de s’attacher à son personnage, un enfant antipathique au premier abord, car froid, ayant le regard vide comme sans émotion. Même quand il frappe ses balles de tennis, son aspect est robotique. Le décor du film est aussi à cette image : clinique et distant. John donne ainsi l’impression qu’il s’ennuie tout au long du film, comme s’il cherchait à combler un vide, en essayant d’avoir plus de libertés et tenter d’être adulte, le fameux « hole » (« trou ») du titre original en quelque sorte !

Seulement voilà, et on l’a vu ci-avant, le traitement à l’écran est mal fait, alors que la fin arrive comme un cheveu sur la soupe et que surtout, personne ne dit rien à cet enfant proche du psychopathe qui ne sera même pas puni ! On croit rêver ! Que sont donc bien venus faire Michael C. Hall (le pourtant formidable "Dexter") et la ravissante Taissa Farmiga ("American horror story" et "50 states of fright (saison 2)") dans cette galère ?

En conclusion, cette métaphore du passage à l'âge adulte (on « tue » symboliquement les parents) est ratée malgré un départ prometteur car on s’enfonce trop rapidement vers le long-métrage pseudo psychologique foireux à l’image magnifique certes, mais au scénario creux au possible ! On ne peut effectivement pas passer à côté des incohérences manifestes qui flinguent en plein cœur toute la crédibilité du film, sans compter l'insertion d'une autre histoire incompréhensible, celle d'une fille et sa mère, qui l'abandonne et dont on ne sait pas ce que les scènes viennent faire là, mais le réalisateur en a-t-il lui-même idée ? Moralité : Le monde de John est un métrage frustrant qui nous présente des éléments sans vraiment les expliquer, comme avec la fin qui en laissera plus d’un sur sa faim !

Monde de John – Le  | John and the hole | 2021
Monde de John – Le  | John and the hole | 2021
Monde de John – Le  | John and the hole | 2021
Bande-annonce
Note
2
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Vincent Duménil