Videodrome
Videodrome
Max Renn, le patron d'une petite chaîne câblée indépendante, cherche des programmes alliant sexe et violence afin de se démarquer de la concurrence. Un jour, son ami Harlan, pirate informatique, lui dégote un programme nommé Videodrome, dans lequel il n'y a pas de scénario, uniquement de la torture et des meurtres. Intrigué par ces vidéos, Max Renn, qui vit une liaison sado-maso avec la journaliste Nicki Brand, va faire des recherches approfondies sur Videodrome et découvrir qu'il se cache quelque chose de bien plus complexe derrière ce programme pour adultes...
L'AVIS :
Poursuivant ses travaux sur la chair, ses mutations et ses transformations, débutés en 1975 avec "Frissons" et poursuivis avec "Rage" (1977), "Chromosome 3" (1979) et "Scanners" (1981), le Canadien David Cronenberg hisse encore le niveau en 1983 lorsqu'il présente au public l'excellent "Videodrome" ! Quasiment une sorte d'oeuvre-somme pour le réalisateur qui atteint ici l'apogée de ce qu'il appelle la nouvelle chair.
A travers la phagocytage de son personnage principal (le génial James Woods) par une nouvelle technologie, un signal caché dans un programme vidéo pour adultes qui prend totalement possession de celui qui le visionne, faisant naître dans son cerveau une nouvelle excroissance provoquant des hallucinations qui le détournent de la réalité et transforment son corps en un réceptacle vivant, Cronenberg va encore plus loin que dans ses films précédents en terme de mutation corporelle, aidé par les extraordinaires effets-spéciaux dus à Rick Baker.
On n'est pas prêt d'oublier les scènes chocs du film, comme celle dans laquelle James Woods s'introduit une cassette Betamax ou un pistolet dans le ventre, celui-ci possédant une ouverture quasi vaginale permettant l'introduction de ces objets ou bien encore ce poste de télévision qui devient vivant, qui respire et qui voit son écran sortir littéralement de son habitacle entre autres, comme pour mieux pervertir le spectateur et étendre son emprise sur lui. Sur fond de thriller ténébreux, à base de snuff movies, annonçant avec des années d'avance des films tels "8MM", "Hostel" ou toute la vague des Torture Porn, David Cronenberg livre une oeuvre puissante sur le pouvoir des images, des médias, sur l’avilissement de la pensée via le tube cathodique, et annonce les futures dérives créées par les réseaux sociaux, les chaînes de désinformation, l'attrait du public pour le voyeurisme et la violence, les fakes news et j'en passe.
Un propos terriblement visionnaire en 1983 mais qui trouve un écho bien tristement réaliste en 2022 ! Visionnaire, Videodrome l'est à l'époque de sa sortie, assurément. Mais pas seulement pour son aspect de brûlot contestataire sur l'abrutissement des masses via la télévision. Non, il l'est aussi par les technologies qu'il propose, comme ce casque de réalité virtuelle que place sur sa tête James Woods ! Certes, les travaux sur la réalité virtuelle ont débuté dans les années 70 mais Videodrome est certainement l'un des premiers films à le faire découvrir au public. Mis en scène de manière efficace, Videodrome permet à la chanteuse de Blondie, Deborah Harris, de livrer une saisissante composition, interprétant une journaliste attirée par le masochisme et la violence physique.
Avec un réel sens du propos et une intelligence raffinée, Videodrome s'impose comme l'un des tours de force majeur de David Cronenberg et le miroir qu'il nous renvoie de notre société actuelle prouve bien qu'il était prophétique et en avance sur son temps.
* Disponible en DVD et BR chez ELEPHANT FILMS
Outre le film en version intégrale, on trouve niveau bonus sur cette superbe édition :
- Scènes inédites - version TV (25 min. env.)
- La bouche, le film par Serge Grunberg et Stephane du Mesnildot
- Making-of promotionnel
- Bande-annonce d'époque
- 2 teasers d'époque
- Les 4 premiers films de David Cronenberg, restaurés en haute-définition :
* Transfer (7 min. - 1966)
* From The Drain (14 min. - 1967)
* Stéréo (65 min. - 1969)
* Crimes Of The Future (63 min. - 1970)
- Inclus : 1 livret de 24 pages par Stephane du Mesnildot