Thanksgiving - la semaine de l'horreur
Thanksgiving
Le soir de Thanksgiving, Thomas Wright décide d’ouvrir son supermarché afin d’exploser ses ventes annuelles. Malheureusement, la cohue vers le grand magasin va déclencher une série de réactions en chaîne, entraînant la mort de plusieurs personnes. Un an plus tard, un tueur masqué commence à éliminer les personnes présentes lors ce terrible drame, avec en cœur de cible la fille de Thomas, Jessica, et ses ami(e)s. Qui se cache derrière le masque ? Jusqu’où ce massacre ira-il ?
L'AVIS :
Eli Roth est de retour ! Joyeux Thanksgiving !
Voilà, c’est dit, même si cette phrase d’accroche est perfectible tant le réalisateur/producteur n’est jamais parti. Pourtant on ne peut qu’être enthousiaste à le voir faire son comeback dans l’univers de l’horreur qui tâche. Depuis son premier succès, le formidable "Cabin Fever", puis l’efficace dytique torture-porn "Hostel", on avait quand même perdu le réalisateur dans un dédale de films aux genres divers et variés : le film de cannibale, le thriller, le revenge movie et même le film pour enfants. Avant qu’il parte à nouveau vers d’autres galaxies (celles lointaines et futuristes de "Borderlands"), profitons de son retour au source et de son dernier effort : "Thanksgiving - la semaine de l’horreur".
Comme son nom l’indique plus ou moins, "Thanksgiving" est un slasher dans la longue tradition des films des années 70 ("Black Christmas", "Halloween"…) et 80 ("Vendredi 13", "Le jour des fous", "Meurtres à la Saint Valentin"…) qui utilisaient une date ou une fête pour placer leur massacre. Pour l’historique, la première apparition du projet « Thanksgiving » date de 2007 au travers d’une fausse bande-annonce placée entre les deux films Grindhouse de Tarantino et Rodriguez. Si le (vrai) long-métrage garde le même concept que le trailer fake ainsi que des idées similaires, il perd ou modifie, malgré tout, quelques éléments en chemin.
En effet, si les deux minutes et trente secondes de 2007 apparaissaient visuellement comme référencées années 70, ici, nous avons ici droit à une version moderne. Fini le grain abîmé de l’image, bonjour le numérique propret. Cette évolution n’est pas que dans la forme, puisque le cadre du film est maintenant contemporain avec son lot de smartphones et d’outils technologiques. Un choix qui décevra peut-être certains, mais qui permet au réalisateur de traiter un paradoxe occidental intéressant : le partage lors de la fête du jeudi soir et l’individualisme du lendemain, lors du black Friday. Un point de vue pertinent qui nous offre une scène d’introduction que n’aurait pas renier Georges A. Romero. Mais chez Eli Roth, pas de zombies, pas de métaphore, c’est direct, moins subtil, mais c’est quand même bien efficace.
Une fois passé ce préambule à la fois violent, drôle et oppressant, l’ambition du film se cantonne à proposer un slasher classique, respectueux de ses aînées, déroulant son jeu de massacre avec un tempo précis et une rythmique évitant tout ennui. Le féru du genre venant d’ailleurs voir ce spectacle pour ses mises à mort ne sera pas déçu. Roth propose un spectacle graphique et plutôt original qui réjouit autant qu’il angoisse. Petit bémol, certaines scènes, tirées de la bande annonce, sont tournées avec une étonnante retenue. Si la fameuse séquence du trampoline est toujours là, elle a été étonnement moins sexualisée. Exit les seins nus et le couteau dans le vagin pour ce meurtre… Et d’ailleurs, exit le sexe en général dans le film. Un choix un peu décevant, tout comme le fait que certains meurtres soient quelque peu expédiés alors qu’ils auraient gagné en efficacité à durer un peu plus longtemps. Le comité de censure est-il derrière tout ça ? Étonnant quand on voit que le réalisateur ne lésine pas sur l’hémoglobine et les viscères à l’air. Toutefois, si on ne s’en tient pas aux promesses que nous avait faite la bande-annonce 16 ans plus tôt, le film fait tout de même vraiment le taf. Le bodycount s’allonge environ d’un mort toutes les dix minutes (c’est à la louche, hein !) et l’étau se resserre avec efficacité sur nos héros.
D’ailleurs, parlons-en de nos héros ! Globalement, la même bande de jeunes américains que l’on retrouve dans tous les slashers, avec plus ou moins de présence et de choses à jouer pour les acteurs. Si la plupart des comédiens s’en sort avec les honneurs, sans époustoufler pour autant, il faut tout de même mentionner le fait que l’héroïne/final girl Jessica est interprétée par une jeune actrice qui crève l’écran : Nell Verlaque. Charismatique, avec un côté girl next door appréciable, elle porte le film sur ses épaules et est certainement une des rares Scream girls à pouvoir tenir la comparaison avec Jamie Lee Curtis ou Neve Campbell. Détail amusant en parlant de notre chère Neve, Patrick Dempsey qui joue le rôle du shérif dans le film est aussi apparu dans la saga "Scream" en tant que détective et mari de Sidney Prescott.
Bref, cette bande va se retrouver confronté à un tueur masqué déguisé en John Carver, personnage historique et premier gouverneur de la colonie de Plymouth, dont la recherche de la véritable identité devient l’intérêt principal de nos héros et, bien sûr, des spectateurs. Pas de spoil concernant le reveal du tueur, d’autant qu’un deuxième visionnage serait nécessaire pour vérifier si tout est cohérent. Toutefois, le film s’amuse avec un certain talent à nous mener sur différentes pistes qui disparaissent au fur et à mesure que les têtes tombent.
Point de vue réalisation, on appréciera grandement l’ambiance et le soin apporté au design, décors et accessoires. Du côté de la mise en scène, cela reste très fonctionnel. Ici, pas de plans séquences ou de figures de styles particulières, l’intérêt est plutôt sur la manière dont sont montées les scènes afin de faire monter la tension et proposer quelques jump scares efficaces et beaucoup d’effets gores salaces. Si le film assure donc le spectacle niveau violence graphique, il se veut malgré tout fun et jubilatoire. Ses mises à mort cocasses et what the fuck y jouent pour beaucoup, mais le métrage assume aussi ce côté tiré par les cheveux à travers ses répliques et ses situations. Certaines idées sont plutôt bien trouvées comme cette victime venant de se faire défigurer qui n’arrive pas à débloquer son smartphone pour appeler les secours car ce dernier n’arrive pas à détecter son empreinte digitale couverte de sang, ni son visage amochée. Drôle et malin, comme l’est souvent le cinéma d’Eli Roth.
Au final, « Thanksgiving », malgré quelques réserves, rempli son contrat haut la main et offre aux amateurs de slashers ce pourquoi ils ont payé leurs places. A l’instar d’"Hostel" qui dénonçait de manière sous-jacente certaines réalités américaines, Eli Roth ne cherche pas à appuyer son propos anti-capitaliste dans le récit, préférant le laisser percevoir à ceux qui le voudront, sans alourdir le film et laisser ceux qui veulent juste assister à un moment de carnage fun, sans prise de tête, profiter du moment. Généreux, drôle, outrancier, gore, rempli d’idées, le spectacle est donc à la hauteur des attentes placées pour ce type de film. Et ce n’est pas être dédaigneux envers le slasher, puisqu’il s’agit du meilleur genre jamais créé. Voilà, c’est dit.