Affiche française
Stylist - The | Stylist - The | 2020
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Stylist - The

Stylist - The

Brillante coiffeuse dans un petit salon de quartier, Claire rêve de devenir quelqu’un d’autre, de sortir de cette vie très solitaire dans laquelle seul son travail lui permet quelque peu de s’évader en s’abreuvant des histoires de ses clients.
Un beau jour, elle décide de sauter le pas et de changer de vie… au grand damne de son entourage…

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L'AVIS:

Frightfest, Fantastic Fest, Sitges, Gérardmer… Le film de Jill Gevargizian a été projeté dans plusieurs festivals renommés avant de connaître une distribution très remarquée en dvd sur le territoire français (le dvd a notamment été vendu avec le magazine Mad Movies puis un peu partout dans une édition simpliste certes mais peu onéreuse de ce fait).

Quand à votre rédacteur, c’est lors de l’édition 2021 du Festival de Gérardmer, entièrement organisée en virtuel en raison de la pandémie de Covid, qu’il a découvert ce film américain projeté alors dans le cadre de la compétition officielle.
Une compétition de laquelle il reviendra totalement bredouille, à ma grande surprise (la compétition n’était pourtant pas très coriace cette année-là, le hors-compétition étant de bien meilleure facture lors de cette édition avec des "Ghosts of war", "Impetigore", "Superdeep", "Sputnik, espèce inconnue" et "The dark and the wicked" de très bonne facture principalement).
Seuls des films comme "Possessor" de Brandon Cronenberg (Grand Prix de la Compétition), "La nuée" de Just Philippot (Prix de la Critique et Prix du Public) et "Sleep" de Michael Venus (Prix du Jury ex-aequo) semblaient pouvoir l’année-là faire de l’ombre à "The stylist". Et pourtant le film de Jill Gevargizian est bien reparti sans rien, un quatrième film dans la Compétition ayant mis son grain de sel bien que très critiqué dans les Vosges lors de ses projections : "Teddy" des frères Boukherma (qui remportera le Prix du Jury ex-aequo et le Prix du Jury Jeunes).

Bref, "The stylist" est et restera le grand perdant, le grand oublié devrait-on même dire, de cette édition 2021 du festival vosgien. Et pourtant il méritait bien un petit quelque chose… Explications ci-dessous.

Par le biais de son film, Jill Gevargizian nous montre les conséquences mentales dévastatrices que peuvent avoir l’isolement social mêlé à des désirs refoulés chez une personne fragile, ici une talentueuse coiffeuse prénommée Claire qui se forge de nouvelles vies (qui lui permettent de sortir de son train-train quotidien peu exaltant) en enfilant les scalps de ses malheureuses victimes.

Voilà bien un synopsis qui laisse imaginer un film totalement barré. Et pourtant non, le film ne tombe jamais dans le grand n’importe quoi et les déversements sanglants (même si Claire nous offre quelques petits moments bien gratinés comme la mise à mort ratée d’une commerçante du quartier qu’elle va devoir finir à coups de ciseaux en plein visage). Au contraire, "The stylist" est soigné, très littéraire dans son approche, et cherche avant tout à nous peindre le quotidien d’une jeune femme mal dans sa peau, souffrant de solitude et d’ennui, qui en vient au crime pour apporter du « sang » (c’est le cas de le dire) neuf à son quotidien et ainsi briser ce carcan l’exposant à une vie monotone, envieuse de la vie mouvementée et riche en évènements de certaines de ses clientes qui n’hésitent pas à se confier à elle pour leur plus grand malheur (d’ailleurs, cette façon de transposer la confession auprès d’un Homme d’Eglise à une discussion avec sa coiffeuse est une idée fichtrement originale : car il est vrai que nous en viendrions plus facilement à nous dévoiler – et pourquoi pas à confier des secrets – à un(e) coiffeur(se) qui en général est une personne qui ne nous connait pas vraiment et qui n’interfère pas de ce fait avec notre vie privée plutôt qu’à quelqu’un de notre entourage avec qui certains secrets pourraient rapidement être exposés).

Plongés dans la tête malade de notre protagoniste qui nous livre ici une performance remarquable, à l’image d’une certaine Angela Bettis dans le très bon "May" de Lucky McKee, nous la suivons dans ses pulsions meurtrières sanguinolentes que rien ne semble pouvoir arrêter, malheureusement pour son entourage.
Et c’est dans une simplicité, une détermination et un calme surprenants et inquiétants à la fois que Claire procède aux scalpations de ses victimes, le tout sous une musique douce faite de synthé et de chœurs comme si nous étions dans quelque chose de paisible/tranquillisant et surtout de normal. Des scènes qui font leur petit effet devant tant de précisions (un vrai acte chirurgical dans lequel le scalpel est troqué par la bonne vieille paire de ciseaux de coiffeur bien évidemment), que ce soit dans la justesse des gestes de Claire que dans son calme olympien pour procéder à ces actes horribles et sanglants qui, dans sa tête, semblent déjà écrits et tout tracés.

Et nous ne perdons pas de temps pour entrer dans la folie mentale de Claire : moins de 10 minutes de film suffiront pour voir notre jeune coiffeuse en train de scalper sa première victime.
Un monstre dissimulé sous les traits d’une belle jeune femme réservée, à l’allure innocente, qui n’hésitera pas à se laisser dicter des agissements incompréhensibles par son cerveau malade. Ainsi, on verra Claire par exemple entrer chez des gens, scruter les lieux et même essayer des vêtements de la garde-robe avant de s’enfuir à plusieurs reprises sans avoir été démasquée. On la verra bien évidemment commettre des crimes avec toujours comme point d’orgue la scalpation qui lui permet alors de s’adonner seule à une sorte de transfert dans la peau de sa victime.
Inquiétante et imprévisible, Claire l’est de plus en plus au fil de cette histoire et cette relation amicale qu’elle entretient avec Olivia, une copine qui s’apprête à se marier, est de plus en plus fragile, Claire s’investissant de plus en plus dans cette relation (qui pourrait finalement la sortir de ce mal-être qu’elle vit au quotidien) alors que la future mariée, elle, la juge de plus en plus envahissante et lui fait savoir plus ou moins adroitement.

Perturbée, Claire soulageait son mal-être en scalpant ses victimes (on pense inévitablement à un certain "Maniac") et la seule personne qui pouvait lui faire du bien et l’aider à combattre ses pulsions intérieures était son amie Olivia qui lui offrait comme une porte de sortie vers un Monde meilleur.
Alors que nous pensions peut-être Claire sauvée de ces pulsions meurtrières grâce à cette relation saine avec sa copine, cette scène où cette dernière lui dit ce qu’elle a sur le cœur va être un véritable point de rupture pour la jeune femme. Un seuil qui, une fois dépassé, semble irréversible et plonge Claire dans un désarroi, une détresse et une incompréhension totale. Dur à ce moment d’entrevoir pour la jeune femme une issue joyeuse, une fin heureuse, cette dernière ne dormant plus, restant alors collée à son portable à attendre un message de son amie… Une situation de mal-être qui poussera même Claire à commettre un meurtre sans même connaître sa victime, choisie dans la rue par pur hasard. Jusque là notre fragile coiffeuse choisissait ses victimes dans son entourage, après avoir un minimum conversé avec elles ; or, en s’en prenant à quelqu’un de totalement étranger, Claire montre qu’elle est devenue bien plus dangereuse qu’elle ne l’était déjà, sa maladie mentale ayant progressé de manière irréversible. (Je n’irai pas plus loin pour éviter tout spoiler sur les 20 dernières minutes de film)

La réalisatrice Jill Gevargizian dresse avec "The stylist" le portrait d’une jeune femme déséquilibrée, perdue et en combat perpétuel avec ses pulsions intérieures qui la poussent à commettre des crimes pour se sentir mieux dans sa peau. Cette dernière arborant alors le scalp de ses victimes non pas comme un trophée comme le faisaient jadis les amérindiens mais comme un outil de transfert pour se plonger le temps de quelques minutes dans la peau de personnes dont Claire envie la vie, elle qui n’est pas du tout épanouie dans la sienne.

Boudé dans la Compétition géromoise en 2021 (mais bon c’est le jeu, le deuil est fait depuis longtemps même si la chronique revenait sur cette projection dans les Vosges pourtant remarquée par votre rédacteur), "The stylist" a eu sa revanche lors de sa distribution française sur support laser (dépassant alors, hormis "Possessor", ses concurrents géromois qui sont restés un peu plus dans l’ombre depuis). Une bien belle reconnaissance pour ce film qui vaut réellement le détour si l’envie vous dit de découvrir une psychopathe déséquilibrée et déterminée, d’un calme qui fait froid dans le dos tellement ses actes lui semblent dictés et normaux.

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Bande-annonce
Note
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David Maurice