Affiche française
POSSESSION | POSSESSION | 1981
Affiche originale
POSSESSION | POSSESSION | 1981
Un film de
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oui
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Possession

Possession

Prendre une situation de drame classique pour ensuite faire éclater l'horreur ou une violence inattendue est courant au cinéma : que ce soit le triangle amoureux dans "Tokyo fist", l'amour fou dans "L'empire des sens" ou le divorce dans "Chromosome 3" tout est possible et Zulawski le prouve également en 1981 avec un film choc : "Possession". Ainsi c'est la séparation du couple qui devient sujet à un véritable bain de sang. Marc rentre de voyage d'affaire pour retrouver Bob, son fils et sa femme Anna. Mais Anna rejette son mari, déprime, fait des va-et-vient entre l'appartement et un lieu inconnu… Bref Marc veut découvrir la raison de ce brusque changement. Il la suspecte de voir un amant, et découvre qu'elle couche depuis quelque temps avec le mystérieux Heinrich, qui se plaint également des absences d'Anna. Le mari bafoué fait appel à un détective privé, qui suit la jeune femme jusque dans un curieux appartement, qu'il va tenter de fouiller. Mais dans une chambre, se cache quelque chose dans les ténèbres, de suintant, gluant, bizarre. Mais qu'est-ce donc ? Et pourquoi Anna vient voir cette chose ?

POSSESSION | POSSESSION | 1981

***ATTENTION SPOILERS***

Provocateur mais aussi grand réalisateur avant tout, Andrzej Zulawski réalise avec "Possession", son premier mais pas dernier, film d'horreur puisqu'il reviendra au genre avec "Chamanka". Un film choc, devenu culte et qui secoue toujours autant malgré les années qui passent. Sam Neil ( qui retournera dans le fantastique avec "La malédiction finale", "Jurassic park" et "Event horizon", pas rien quand même) incarne Marc, un honnête mari en conflit avec sa femme, devenue une véritable furie, quittant le foyer sans raison, laissant enfant et mari derrière elle. Même l'amant de la jeune femme, Heinrich, un allumé complet adepte du zen, se demande où est passée la jeune femme. Marc se fera néanmoins éclater la gueule par l'étrange personnage, et engage un détective suivant peu discrètement Anna. En voulant percer le secret de l'appartement où elle se rend, il se fera sauvagement tuer par la jeune femme. Mais l'horreur ne fait que commencer, Anna supprime tous ceux voulant s'approcher de son secret. Un terrible secret qui va conduire le couple au désastre le plus total.

Pour éviter de rendre le film linéaire et ainsi ressembler à un simple film d'horreur, Zulawski injecte une bonne dose de surréalisme, d'hystérie et surtout de métaphysique. Ainsi Marc se retrouve attiré par la maîtresse de Bob, son jeune fils, qui ressemble comme deux gouttes d'eau à sa femme, la folie en moins. Elle est douce, attentionnée, intelligente et s'occupe de Bob. Anna est hystérique, violente, désordonnée (la scène où elle met l'appartement tout simplement en bordel) et cache quelque chose dans un sombre appartement de Berlin. Une chose affreuse, gluante qui n'est en fait qu'une créature tentaculaire avec qui elle fait l'amour. Une horrible créature sanguinolente confectionnée avec soin par Carlos Rambaldi qui s'occupera l'année suivante de l'extraterrestre de "E.T". Le film est également très génereux en effets gores, versant sans hésiter dans le grand guignol (signalons par exemple un pauvre homme salement charclé à coup de tesson de bouteille ou Adjani s'éraflant à coup de couteau electrique).

Adjani est bien sûr l'élément principal en puissance du film, opérant un numéro hallucinant qui en a laissé pantois plus d'un. Un rôle qui atteint des sommets d'hystérie, de brutalité, et qui a été récompensé à l'époque par le césar de la meilleure actrice. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la scène du métro, qui compte parmi les scènes les plus incroyables de l'histoire de cinéma. Il est clair qu'on comprend vite fait pourquoi la demoiselle est partie en thérapie après avoir joué dans le film! A la manière de Kubrick dans "Shining", Zulawski filme ses acteurs dans des décors imposants, mais surtout inquiétants et lugubres. L'appartement de l'amant est d'ailleurs un parfait exemple, reflétant l'état d'esprit de la pauvre Anna, avec ses murs décrépits, ses pièces vides, sa moisissure, son côté inconfortable ou même l'immense porte d'entrée qui n'annonce rien de bon. Cette atmosphère fait d'ailleurs penser à la trilogie des appartements de maudits de Roman Polanski (autre réalisateur polonais donc) avec ses appartements sans âme, qui baignaient le spectateur dans une ambiance malsaine du début à la fin.

Outre la Venise glauque de "Ne vous retournez pas" ou le Tokyo étouffant de "Tokyo Fist", c'est Berlin qui fait les frais d'une vision maussade, grisâtre, avec des rues trop grandes et trop vides, et des bâtiments démesurés qui dérangent au plus haut point. Mais l'un des grands moments du film reste sa scène finale apocalyptique, hyper violente et surtout difficilement compréhensible, car à plusieurs sens. Quel est ce sosie de Marc venant frapper à la porte de Helen et provoquant une réaction impensable du jeune Bob ? Serait-ce l'amant monstrueux ayant pris forme humaine et s'avérant être au bout du compte le double maléfique de Marc ? La présence du Mur de Berlin à proximité de l'appartement du couple et le bombardement final auraient-ils un lien ? Ce bombardement ne pourrait-il pas signifier que le mal a survécu et a pris enfin forme humaine ? Il y aurait trop de choses à dire là-dessus tellement le film de Zulawski intrigue, surprend et fascine. La musique de Andrzej Korzynski possède même un style rappelant les B.O de certains films de Fulci. Un tel film se confrontera à la censure et se retrouvera divisé en trois versions : l'américaine de 80 minutes, remontée et inutile ; la française de 127 minutes et l'anglaise de 118 minutes. Seul le DVD américain possède le director's cut de 127 minutes mais sans sous titres ni v.f. Même les deux VHS françaises proposent le montage anglais, ce qui est fort dommage. Cependant ce montage n'empêche pas "Possession" d'être un véritable chef d'œuvre, où Zulawski a l'audace de fusionner un drame de son cru avec "The thing".

POSSESSION | POSSESSION | 1981
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Note
5
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Jérémie Marchetti