OTHER
OTHER
Le brutal décès de sa mère oblige Alice à revenir dans la maison familiale, perdue au cœur de la forêt du Minnesota, pour y régler des formalités administratives inévitables. A peine arrivée sur place, elle replonge dans les souvenirs d’une enfance traumatisante et va se retrouver peu à peu prise au piège de cette demeure qui semble comme hantée par une présence mystérieuse...
L'AVIS :
Avec Other, David Moreau confirme sa maîtrise du cinéma de genre après son excellent bad trip psychédélique "Mads". Son dernier film en date explore ainsi la mémoire d’une femme contrainte de revenir dans sa maison d’enfance, un lieu où les souvenirs douloureux liés à sa relation traumatisante avec sa mère décédée semblent comme imprégner chaque recoin et transforment cet espace familier en source d’angoisse, d’autant qu’une ombre semble tapie dans un coin, prête à jaillir à tout moment. Other prend donc l’apparence d’un huis clos mâtiné de home invasion movie nous enfermant avec Alice dans cette habitation familiale dans laquelle elle est revenue à contrecœur, un peu comme Marc-André Grondin reparti au Québec à la mort de son père, afin de régler des affaires de succession dans l’étonnant et très bon Le successeur de 2024.
Partant d’une intrigue paraissant relativement simpliste avec cette jeune femme confrontée à des souvenirs tragiques liés à l’éducation stricte de sa mère rappelant parfois la génitrice dans le récent "The ugly stepsister", David Moreau arrive pourtant dès les premières séquences à instaurer un climat anxiogène à la limite du cauchemar sensoriel. Le réalisateur français parvient à transcender sa trame avec : une caméra à l’épaule oppressante, des visions infrarouges perturbantes, un usage du hors-champ laissant libre court à l’imagination qui nous fait toujours voir le pire, une photographie froide, ainsi qu’une bande-son minimaliste faisant plus la part belle à un sound design glaçant le sang !
Ce qui rend l’expérience encore plus troublante, c’est l’absence totale des visages des autres personnages (apparaissant à chaque fois masqués ou bien de façon cachée, ce qui est assez bien fait, avouons-le), comme s’ils n’existaient plus en tant qu’humains, mais seulement comme des présences, qu’elles soient bienveillantes ou menaçantes, ce qui suggère encore plus l’enfermement personnel de l’héroïne. Et justement, au cœur de ce cauchemar domestique, l’interprétation de la sublime Olga Kurylenko (déjà vue dans des longs-métrages de genre sympas comme "Oblivion", "Dans la brume" ou encore The room) est saisissante, l’actrice d’origine Ukrainienne livrant une performance d’une justesse confondante. Son personnage, apparaissant comme fort au début, va révéler peu à peu une fragilité certaine face aux événements qui s’enchainent et aux souvenirs qui refont surface.
Alors certes, comme beaucoup, David Moreau a parfois pas mal recours aux jumpscares (une clé dans une serrure, une lumière qui s’allume ou qui s’éteint, une porte qui claque, etc.), ce qui peut dérouter pas mal de spectateurs, mais peut fonctionner à merveille sur d’autres. Tout comme il surcharge sa trame principale avec une intrigue parallèle pas forcément obligatoire et peu crédible avec ce jeune voisin adepte du drone ayant semble-t-il installé tout seul un système de surveillance ultra sophistiqué ! Malgré tout, la tension reste palpable jusqu’au bout, grâce à un sens du rythme maîtrisé et un final réussi qui change des fins habituelles. Le récit installe ainsi un malaise qui nous tient tout le long du film et beaucoup de thèmes intéressants sont également abordés comme la quête de perfection excessive et la capacité de certains d’être dans le déni face à une situation extrême. De fait, c’est peut-être imparfait mais son atmosphère bien glauque et le talent de son réalisateur rendent ce Other largement visionnable l’espace d’une soirée !
Ce thriller horrifique français aux airs de déjà-vu vaut le coup d'œil pour son ambiance délétère, son travail sur le son et l'image, notamment le fait pour Alice de ne distinguer jamais aucun visage clairement pour mieux symboliser son isolement psychologique (dixit le réalisateur David Moreau), sa protagoniste principale (incarnée par la sublime Olga Kurylenko) de retour dans la maison familiale où elle a grandi mais aussi subi l'éducation extrêmement rigoureuse de sa mère et pour sa fin WTF un peu à l'instar de celle de "Massacre au camp d'été" en son temps. Dommage en revanche, qu'il y ait une vaine sous intrigue qui n'apporte pas grand-chose au métrage et deux, trois jumpscares dispensables.