Ladyhawke la femme de la nuit

Ladyhawke

Surnommé "La souris", le jeune Philippe Gaston est un petit voleur facétieux, qui s'échappe non sans quelques problèmes du donjon d'Acquila ou il était enfermé. Errant dans la campagne, il est rapidement retrouvé par les gardes du donjon, mais sera sauvé in extremis par un mystérieux individu : l'ex-capitaine de la garde Etienne de Navarre. Faisant halte chez un couple de paysans semi débiles, Philippe voit un loup attaquer son agresseur pendant la nuit et aperçoit une splendide jeune femme, qui disparaîtra bien vite. Fascinée par la belle, il en parle le lendemain à Navarre, qui semble connaître bien des choses sur elle. Au fil de son aventure, le jeune garçon découvre qu'une malédiction cèle l'intrigante jeune femme et le noble guerrier : "Toujours ensemble, éternellement séparés"

LADYHAWKE LA FEMME DE LA NUIT | LADYHAWKE | 1985

Réalisateur aussi intègre que correct, Richard Donner aura livré au cinéma la saga des "Arme Fatale" et le fameux "Superman" avant de se faire plus discret dans les années 90. Pour le rapprocher du cinéma fantastique, il faudra rappeler tout simplement son statut de producteur pour la série "Les contes de la crypte" et de réalisateur pour le diabolique "La malédiction". Dans la mouvance des films d'Heroic Fantasy, Richard Donner livre un très bel exemple du genre avec l'inattendu "Ladyhawke", qui ne se pose heureusement pas en tant que blockbuster ou mega-production. Donner préfère un film simple, mais d'une grande beauté.

L'excellente idée de base au premier abord, c'est surtout le fait de réunir trois grands acteurs à l'époque en plein tournant de carrière, et qui se faisaient déjà un nom avec une poignée de films cultes : Mathew Broderick, jeunot et héros de "Wargame", Michelle Pfeiffer, remarquée dans "Scarface" en jouant l'épouse de Tony Montana, et Rutger Hauer avec ses rôles de peintre excentrique dans "Turkish Delight" et d'androïde ambigu dans "Blade Runner". Le succès le poursuivant toujours, il connaitra d'ailleurs une belle gloire avec "La chair et le sang" et "Hitcher". Il ne trouve cependant pas un rôle de méchant dans "Ladyhawke" mais apporte comme toujours cette touche de comédien "tragique" habituelle.

Après un mixte général du monde de la Fantasy dans "Willow", le monde des monstres et des merveilles (et surtout des monstres) dans "Legend", ou celui de la barbarie et des guerriers à la soif de violence grandissante dans "Conan le barbare", "Ladyhawke" se rapproche plutôt du monde des légendes et des chevaliers, à la manière d' "Excalibur" et du "Dragon du lac de feu". L'époque du Moyen-âge est choisie très distinctement, mais avec une touche de magie en plus.

Loin du soin esthétique baroque et flamboyant de "Excalibur", "Ladyhawke" fait preuve d'une reconstitution pourtant quasi-parfaite de l'époque, et n'aura nul besoin de déployer des décors faramineux pour le prouver. Donner se contente de forêts mystérieuses, d'un imposant donjon, de belles auberges nappées de pluie ou de château en ruine. Certains paysages sont d'une rare beauté, et n'utilisent justement aucun artifice. Et puis comment oublier ces splendides montagnes enneigées ?

"Ladyhawke" tourne donc autour de la terrible malédiction jetée sur deux amants, Isabeau d'Anjou et Etienne de Navarre. Victimes de la jalousie maladive et implacable d'un évêque, ils se verront à la fois réunis et séparés, le jour et la nuit, en se transformant en animaux. Etienne devient un loup noir lorsque le soleil tombe, et Isabeau devient un agile faucon lorsque la lune se couche. Très vite mêlé à cette douloureuse relation, le jeune Philippe Gaston devra guider Navarre jusqu'à la cité d'Acquila ou siège le dangereux évêque, qu'il compte tuer de ses mains. Cet évêque aurait invoqué les forces du mal voire le diable lui-même pour faire abattre cette malédiction, qui ne finira que lorsque les deux amants seront ensemble, sous leur forme humaine, chose qualifiée de quasi-impossible.

Richard Donner modèle un film au final assez épuré, à l'esprit plus proche du "Dragon du lac de feu" que de "La chair et le sang", car si violence il y a, elle reste parfaitement clean pour ainsi capter un public plus jeune. Même ce chasseur de primes hirsute dont la tête se retrouve choppée littéralement par un piège à ours, n'offrira aucune explosion de violence. Pourtant, on finira par oublier ce côté "tout public" qui ne signifie par pour autant "label Disney". Pas de mauvais goût ou de pétage de plombs techniques à la "Willow", Donner positionne quelques jolis éclairages par ci par là, et un minimum d'effets visuels.

Peut-être qu'un peu plus d'éléments fantastique ou magiques n'auraient pas été de refus, ainsi que la suppression de cette bande sonore très discutable. Alors que le film se retrouve gorgé d'une poésie et d'un romantisme lisse sans faille, Donner balance des sonorités synthétiques et rock pour la plupart des scènes dites "palpitantes". Seulement elle a bien du mal à accrocher aux images et finit par se rendre discrète dans la deuxième partie. On ne le regrettera pas, malgré une certaine harmonie dans la sublime scène d'intro, que certains pourraient designer comme "clipesque".

Si cette alchimie et cette simplicité plaît déjà beaucoup, les performances de Rutger Hauer et de Michelle Pfeiffer surprennent encore plus. Rutger Hauer déploie un impeccable charisme en chevalier noir tout droit sorti d'une toile de Frazetta, et Michelle Pfeiffer illumine le film par sa beauté angélique et son majestueux regard, qui colle parfaitement au personnage envoûtant d'Isabeau.

Ne visant jamais le grand spectacle, "Ladyhawke" évite d'aligner des scènes phénoménales et archi spectaculaires comme n'importe quel film pop-corn de son époque, et dans le seul but de rameuter un certain public adolescent. Sans être mou et ennuyeux, le film de Donner délivre de temps à autre quelques séquences drôlement bien ficelées comme cette dangereuse marche sur la glace ou cette traque risquée dans un forêt aux allures quasi-mystiques. Donner ne caricature aucun de ses personnages, la plupart etant animés d'une foi touchante et crédible. On excusera cette B.O non adéquate, pour se tourner vers cette œuvre au charme incontestable, qu'on revoit toujours avec grand plaisir.

LADYHAWKE LA FEMME DE LA NUIT | LADYHAWKE | 1985
LADYHAWKE LA FEMME DE LA NUIT | LADYHAWKE | 1985
LADYHAWKE LA FEMME DE LA NUIT | LADYHAWKE | 1985
Note
5
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Jérémie Marchetti