Hellraiser 2 - hellbound
Hellbound - hellraiser 2
Au début du vingtième siècle, un officier des colonies anglaises résout la Configuration des Lamentations. Les poinçons jaillissent du cube pour le lacérer, puis son crâne et son visage sont marqués et quadrillés de clous...
Kirsty Cotton, quant à elle, reprend ses esprits dans la chambre d'un institut psychiatrique. Tandis qu'elle témoigne des événements traumatisants qu'elle vient de vivre quatre heures auparavant (voir critique "Hellraiser"), le Docteur Philip Channard, directeur de l'établissement et initiateur de curieuses expériences sur le cerveau, cherche à se procurer le matelas ensanglanté sur lequel Julia Cotton est morte.
Son assistant Kyle McRae assiste en cachette à la résurrection de Julia et, horrifié, sort Kirsty de l'institut. Mais trop tard : grâce à la petite autiste Tiffany, le Docteur Channard et Julia ont réussi à ouvrir les portes de l'Enfer, et ils comptent bien y régner en maîtres…
La saga "Hellraiser" est l'histoire d'une dégringolade. Malgré les nuances apportées par Clive Barker lui-même sur ce deuxième épisode (qui de fait est la plus réussie de toutes les séquelles), on n'insistera jamais assez sur le fait que le scénario n'est pas signé par le créateur de la franchise, mais par son ami Peter Atkins, et que sa réalisation est signée Tony Randel. Or, en vertu de la plus simple des logiques, on ne peut pas obtenir un bon film en additionnant un mauvais scénariste et un mauvais réalisateur. Et la seule chose qu'on puisse apporter à la défense, c'est que personne ne pouvait savoir à l'époque à quel point ils étaient mauvais, tandis qu'aujourd'hui, on le sait.
Dire que "Hellbound" est inégal serait une approximation. A vrai dire, chaque scène du film semble séparée des autres comme une volaille bien découpée et mal ficelée (d'autant que la censure a fait disparaître quelques pilons juteux, mais cela ne suffit pas à tout expliquer). Entre chaque morceau : le vide, la superficialité d'une imagerie brillante, l'incohérence et l'incapacité à donner une substance véritable au sujet. Malgré son ambition de départ, "Les Ecorchés" ne creuse pas la thématique lancée par "Hellraiser" premier du nom : il se contente de tirer dessus comme on le ferait d'un morceau de chewing-gum et de forcer le trait, à l'instar de Christopher Young dont la musique est devenue tonitruante, mais guère renouvelée.
La première partie est souvent désignée comme étant la plus fidèle au premier opus. C'est fort heureux, puisqu'elle est en partie constituée d'extraits mêmes de "Hellraiser", et que, pour le reste, elle copie quasi intégralement ses scènes les plus fortes, en y apportant quelques maigres modifications et des effets spéciaux, certes, plus réussis. Modifications proprement transgéniques, pour filer la métaphore du poulet, puisqu'à la place de la scène d'ouverture de Franck dans "Hellraiser" se trouve celle de l'homme qui deviendra Pinhead dans "Hellbound", et qu'à la place de la résurrection du même Franck se trouve celle de Julia… Pas de doute, le film de Tony Randel est plus graphique et met le paquet sur le gore, mais quoi ? Depuis quand cela suffit-il à bâtir un film?
Le personnage du Docteur Channard, quoique pas très original (un petit relent de "Re-Animator", n'est-il pas ?) est le plus intéressant de cette première partie, grâce à l'interprétation remarquable d'un Kenneth Cranham tout en hypocrisie et en impavidité saurienne. On ne peut pas en dire autant de Julia, qui se borne à répéter les gestes de Franck (la fameuse bouffée de cigarette), à rouler de gros palots et qui, inexplicablement, a besoin de cinq ou six victimes pour retrouver sa peau alors qu'une seule a suffit pour la faire renaître à la vitesse grand V, la dernière victime attendant non moins inexplicablement les dernières secondes de son existence pour trouver effrayant son environnement de cadavres décomposés. Tout au plus peut-on se consoler avec la scène de bandage Velpeau, très tactile et faisant pendant un moment de Julia un beau renouvellement de la "Momie" et de "L'homme invisible".
La deuxième partie est la plus intéressante puisqu'elle contient tout le challenge du film, mais elle est aussi extrêmement décevante. D'abord parce qu'elle n'est pas crédible. La retenue des Cénobites à l'égard de Tiffany touchera directement notre fibre intime de Bisounours, mais elle désacralise déjà singulièrement le personnage de Doug Bradley et de ses comparses. Le sort de chacun d'entre eux est d'ailleurs si misérable qu'on préfèrerait mille fois n'avoir eu aucune explication sur leur origine plutôt que de subir ça… Exploration de la mythologie "Hellraiser" ? Plutôt destruction par cuculisation. Une véritable honte, qui fait de l'affiche une tromperie intégrale, et de la scène d'introduction un misérable prétexte scénaristique.
Il y a toutefois du bon dans cette exploration des enfers. Hormis les moments où nos mirettes, désormais habituées à mieux, décèlent facilement le carton-pâte et la peinture (joli ciel bleu ripoliné), de véritables trouvailles graphiques font leur apparition, tel le Leviathan et sa diffusion de noirceur, où encore la magnifique scène de retrouvailles avec Franck, dont l'enfer personnel est comme par hasard le plus sensuel, le plus angoissant et le plus riche. Tout niaiseux qu'il est, le personnage de Tiffany (Imogen Boorman) intéresse aussi par la relation que semble avoir entretenu sa mère (Catherine Chevalier) avec le Docteur Channard, dimension qui n'est malheureusement guère creusée.
Le duo Tiffany/Kirsty (Ashley Laurence, toujours hostile aux coiffeurs comme aux cours de théâtre) nous aide d'ailleurs quelque peu à nous retrouver dans la brochette de scènes chocs et farfelues qui suivent, leur manque de liaison tirant l'ensemble vers ce que la bande dessinée peut avoir de plus désagréablement superficiel. Un aspect qui se retrouve dans les dialogues, abominablement emphatiques ou involontairement grotesques ("Ce n'est pas la main qui appelle, c'est le désir", ou encore "Vous avez toutes vos vies derrière vous à présent, pas d'anesthésiant, c'est dommage"). On se croirait dans un théâtre à la fin du XIXème siècle.
Voilà. D'une innovation géniale et dérangeante, Peter Atkins et Tony Randel ont commencé à faire une caricature digeste à destination exclusive des adolescents. Clive Barker n'avait fait qu'en raconter l'histoire au cours d'une soirée de griserie, porté qu'il était par la belle tournure du premier opus… L'enthousiasme coûte cher : une amère leçon qu'il n'avait pas fini d'apprendre.
Retrouvez la critique de la bande originale du film : http://www.horreur.com/fiche_zik.php?idzik=31