Hardcore Henry
Hardcore Henry
Dans un laboratoire secret, un homme en phase de réveil et semblant amnésique se fait greffer un bras et une jambe par une infirmière ravissante qui se présente comme sa femme. Elle lui apprend son nom : Henry. Peu de temps après, un dénommé Akan et ses mercenaires débarquent et enlèvent son épouse. Parvenant à s’échapper, il se retrouve dans un Moscou hostile où tout le monde semble vouloir sa mort, mais il se débrouille assurément très bien en termes de combat et sait manier tous types d’armes. Ne pouvant compter sur personne, il fait toutefois la connaissance du mystérieux Jimmy qui paraît vouloir l’aider mais peut-on lui faire vraiment confiance ? Ainsi, Henry arrivera-t-il à : survivre à ceux l’ayant pris en chasse, sauver sa femme et découvrir plus d’informations quant à sa véritable identité ? Bonne chance à lui !
En ce qui concerne les adaptations de jeux vidéo au cinéma, nous avons connu le pas mal avec "Silent hill" et "Resident Evil", tout du moins relativement aux premiers opus seulement, mais surtout le pire avec "House of the dead" et "Alone in the dark" tous deux signés par Uwe Boll et de sinistre mémoire, les "Lara Croft", les "Street fighter", les "Mortal Kombat", "Super Mario Bros", "Max Payne", j’en passe et des meilleurs, enfin je veux dire des plus mauvais, quoique ce doit être difficile d’en trouver des plus navrants ! Alors quand on apprit qu’un film avait été tourné façon jeu vidéo FPS ("First Person Shooter") c'est à dire en caméra subjective sur une totalité d’une heure trente, on eut très peur ! Bonjour les maux de tête était-on en droit de se dire ! Ajoutons à cela que le procédé du FPS avait déjà été utilisé dans le long-métrage "Doom" (inspiré du jeu vidéo éponyme), mais seulement sur une scène, pour un résultat pathétique, ça laissait présager du pire !
Pourtant, le premier film de Ilya Naishuller tourné en 2015, s’apparente vraiment à une expérience visuelle originale. Effectivement, le métrage apparaît aux yeux des spectateurs, comme un long plan-séquence de 1h30 qui va à 100 à l'heure où l’on a le sentiment de se trouver devant un jeu vidéo mais sans être aux manettes du personnage principal. Vous vous doutez donc bien que, côté scénario, ce n’est pas de l’innovation pure : le héros va d’un point A à un point B afin de retrouver sa gonzesse en défouraillant sévère ! Mais on ne visionne pas Hardcore Henry pour son script puisque l’on suit, en effet, notre héros cyborg qui va tenter de délivrer sa femme des griffes d’un méchant doté du pouvoir de télékinésie, une sorte de « boss » de fin de niveau, plus difficile à battre que les méchants hommes de main qui vont se mettre en travers du chemin d’Henry durant toute son aventure. Ce qui fait avant tout le sel de Hardcore Henry n’est donc pas à chercher du côté du pitch, mais plutôt de celui de l’action pure. Et on peut dire qu’en la matière, le film est complètement insensé, survolté mais ô combien jubilatoire. Il aligne ainsi des personnages hauts en couleurs (l’incontournable Jimmy, notre héros quasi invincible, le méchant avec l’accent bizarre à l’allure de Kurt Cobain mais hyper fort, les filles avec les katanas…), des scènes déjantées, inattendues, des éléments de science-fiction, mais surtout des scènes d’action dantesques évoquant les jeux vidéo les plus pêchus et même certains longs-métrages avec quelques cascades de malade façon Yamakasi avec les parkours de fou (escalade d’'immeuble, chutes vertigineuses, jumps de psychopathe, etc.), qui en font une sorte de fils hybride de "Hyper tension" avec son action non-stop et "Postal" pour ses scènes parfois complètement barrées. Pas le temps de s'ennuyer donc et même si le film se compose presque uniquement de séquences d'action fortes, celles-ci sont suffisamment variées pour ne pas trop nous donner une impression de redite.
Heureusement également que Hardcore Henry ne se prenne pas au sérieux et qu’une bonne dose d’esprit et de second degré vienne pimenter l'ensemble. En effet, Sharlto Copley ("District 9", "Elysium", "Chappie" ou bien "Open grave") apporte une bonne petite touche d'humour avec ses apparitions multiples hyper bien senties, ce qui vient un peu casser le rythme effréné du métrage tout en nous faisant sourire de temps à autre. Encore heureux aussi que le réalisateur aussi scénariste, se soit affranchi de tous les codes en vigueur : il y va à fond en assumant jusqu'au bout son goût prononcé pour l'ultra violence et le gore. Ici, on ne fait pas dans le détail, ni la dentelle, tous les membres volent en éclats et sans anesthésie s’il vous plait ! L'hémoglobine giclera de partout en abondants geysers rouge incarnat et ce jusqu'à plus soif et pour notre plus grand plaisir ! C'est énorme certes, mais totalement assumé par le cinéaste et entièrement validé par nous ! Toutes nos félicitations donc aux maquilleurs des effets spéciaux, aux cascadeurs et aux monteurs car les plans raccords sont invisibles.
Côté casting, on notera, comme dit précédemment, la présence démultipliée de Sharlto Copley, l'acteur sud-africain fétiche de Neil Blomkamp, en totale roue libre, mais aussi une courte apparition de Tim Roth et enfin pour l’anecdote la présence du réalisateur Ilya Naishuller dans un tout petit rôle. La bande originale, quant à elle, est assez réussie, car savant mélange de musique moderne speed avec les Heavy Young Heathens à la manœuvre mais aussi des morceaux plus rock’n’roll avec notamment des extraits des Stranglers et de Queen.
Toutefois, comme on pouvait s'y attendre sur une durée d’1h30, on commence à tourner un peu en rond et la mise en scène, quoique pleine de surprises et particulièrement maîtrisée, s'avère rapidement très répétitive. De plus, l'action n'est parfois pas très compréhensible (notamment la scène finale sur le toit) et c'est un peu épuisant à la longue, voire parfois too much, mais dans l'ensemble, c'est très bien monté. Ilya Naishuller s'en sort bien et, à quelques exceptions près, l'image reste lisible et l’on prend vraiment beaucoup de plaisir à le visionner. Bon après, d’aucuns pourraient aussi arguer que le concept n’est pas si novateur que cela puisqu'en 2013, "Hotel Inferno" utilisait le même procédé, mais bon, ça se laisse franchement bien regarder et on ne dira rien…
En résumé, ce petit film constitue ni plus ni moins qu’une expérience unique, racontée à un rythme de dingue, avec des scènes d’action anthologiques à foison, du gore à profusion et nantie de quelques punchlines efficaces malgré un scénario des plus basiques. Après, cela pourrait en essouffler plus d'un au bout d'une demi-heure, d'autant que certaines scènes ultra rapides ne sont pas si limpides que cela. Quoi qu’il en soit, Hardcore Henry ne vous laissera pas indifférent car c’est un film inédit par ce qu’il propose ! Un style novateur est né, ainsi qu’un nouveau réalisateur, Ilya Naishuller. Espérons qu'il ne se fera pas avaler tout cru par la machine Hollywoodienne comme tant d’autres et notamment Timur Bekmanbetov (ici producteur) repéré avec "Night watch" et désormais actif sur des métrages de commande américains insipides comme "Abraham Lincoln : chasseur de vampires"...