Evil feed
Evil feed
De jeunes pratiquants en arts martiaux sont à la recherche de leur sensei, le père de Jenna. Pendant ce temps, Steven et sa petite amie nymphomane Yuki prennent la tête du restaurant familial « The long Pig » en évinçant le paternel en bonne et due forme. Les chemins de ces deux groupes vont finalement se croiser : les seconds enlèveront les premiers en les forçant à se battre dans une arène contre de féroces gladiateurs version MMA et UFC. Le sort du vaincu sera peu enviable puisqu’il sera tout simplement haché menu pour servir de plat à la carte du restaurant ! Jenna retrouvera-t-elle son géniteur et surtout, sortiront-ils tous indemnes de ce traquenard ?
Evil feed est le premier long-métrage de Kimani Ray Smith en tant que réalisateur. Si vous regardez de plus près le Curriculum Vitae du lascar, vous vous apercevrez qu’il a travaillé sur des cascades pour des films comme "Watchmen", "X-Men : l’affrontement final" et "La Planète des singes : les origines". Il apporte ainsi ici tout son savoir-faire pour créer et coordonner des scènes de combats agréables à regarder et donc un peu plus de crédibilité à l’entreprise. Mais attention, ce n’est pas qu’un métrage à la "Bloodsport" avec des rixes sur un ring ou dojo en un contre un ! En effet, Evil feed (qu’on pourrait traduire par « mal nourri » ou plutôt « nourri par le mal ») est l’un des rares films qui mélange les arts martiaux à l’horreur et le gore. A part "Story of Ricky" et dans une moindre mesure la trilogie "Blade", on a très peu de métrages de cet acabit sur pellicule. Si on ajoute à cela que Evil feed partage un humour pince-sans-rire et le décorum asiatique via son restaurant avec "Les aventures de Jack Burton dans les griffes du mandarin" de John Carpenter, vous conviendrez qu’il constitue ni plus ni moins qu’un Objet Filmique Non Identifié intrigant qu’on a envie de visionner ! Mais est-il regardable pour autant malgré toutes les références énumérées ci-avant ?
Comme on pouvait s'y attendre dans un film qui inscrit de la viande humaine au menu du jour (Ah, ce fameux « Dicky Roll » !), il y a beaucoup de sang et autres geysers d’hémoglobine. Evil feed présente ainsi pêle-mêle : des démembrements (y compris un certain membre mâle coupé et utilisé comme arme…), des décapitations, ainsi qu’un arrachage de gorge, puis une extirpation de visage du plus bel effet, histoire de vous donner un avant-goût de quelques-unes des meilleures scènes gore. Celles-ci, en plus d’être très graphiques, sont par ailleurs relativement bien disséminées tout au long du film et alternent avec des séquences de combats vraiment bien chorégraphiés. C’est cette combinaison des pugilats et de gore qui rend ce métrage étonnamment agréable à visionner. Ajoutons à cela que l'humour noir de l’ensemble est assez bon, pas hilarant hein, mais peut prêter à sourire par rapport au contexte de certaines saynètes. Il n’est donc pas désagréable de voir que l’ensemble tient à peu près la route, d’autant que la comédie (surtout celle de certains métrages asiatiques dans lesquels les acteurs jouent avec trop d’emphase) est souvent le talon d’Achille de ce type de films qui échouent souvent à cause de ce point !
Mais, car il y a un « mais », le gros point faible de Evil feed c’est son casting inégal, et plus précisément la trop grande différence de charisme entre les « méchants » et les « gentils ». Pour les « bad guys », rien à dire ou presque, ils sont vraiment très bons et bien choisis. Avec dans les rôles de premier plan : Steven (Terry Chen vu dans "Les chroniques de Riddick", "I robot") et Yuki (Shirleyann Mason aka Alyson Bath vue dans des séries télévisées sans intérêt) le couple diabolique de l’arriviste et de la nymphomane, Madame Dragonfly (Carrie Genzel vue dans "Watchmen", "Jennifer s body") campant magnifiquement une restauratrice anglaise prête à tout pour obtenir les recettes de Steven et Baphomet (Fraser Aitcheson vu dans "Elysium"), formidable en combattant impitoyable et très sadique. Seule ombre au tableau : Johnson Phan (la série télé « Mortal Kombat ») incarnant The Phammer, un membre de la Triade particulièrement bavard et insupportable au possible. En effet, comment ne pas être indigné devant le cabotinage outrancier d’une espèce de mélange entre le Kim Jong Il de "Team America : world police" et un transsexuel de pacotille !
Côté « gentils » c’est rempli de clichés entre Jenna l’héroïne vengeresse beauté fatale à ses heures perdues, Nash, le beau gosse costaud, Carlos, le gars de la rue, Pete le nerd de service et asiatique cela va de soi, Brian le gros mangeur du lot et Tyrone l’adepte des sports de combat baraqué comme un camion. Bref, il n’y a rien d’alléchant car ils sont quasi tous désignés pour être de la chair à canon et sont interchangeables à l’envi, d’où peut-être le manque d’empathie (volontaire ?) pour eux. Seul surnage Alain Chanoine, l’interprète de Tyrone, le « Chuck Norris black » qui a sur sa carte de visite des rôles dans des productions comme "X-Men : days of future past", "Percy Jackson le voleur de foudre", "Les immortels" ou encore "Blade trinity", ce qui n’est pas trop mal par rapport au reste du groupe !
Autre faiblesse du métrage et non des moindres : son scénario. C’est effectivement linéaire au possible et sans grosse surprise. Nos héros vont d’un point A à un point B en essayant de franchir les obstacles alors que les protagonistes sont trop manichéens, ne laissant ainsi pas de place aux nuances et autres états intermédiaires. Tout cela est dommage, car il est vrai que l’industrie du cinéma est tellement dense que le moindre défaut coûte cher et certaines pellicules peuvent passer aux oubliettes. Ce qui fut mon cas pour ce film, dont j’ai quasiment tout oublié un mois après son visionnage, ce qui n’est pas bon signe sur la qualité du métrage et l’état de ma mémoire tout ça !
Si vous cherchez une touche de raffinement et de délicatesse, fuyez et avouons-le, vous n'êtes pas venu ici par hasard, si ? Evil feed a le mérite d’être un des rares films alliant les arts martiaux, la comédie et le film d'horreur gore avec un peu de seins ! Avec un meilleur scénario en place et des héros beaucoup plus charismatiques, nous aurions pu avoir un mémorable long-métrage. Mais il s’agit-là d’un premier film, donc d’une œuvre imparfaite et Kimani Ray Smith, le réalisateur a encore le temps de faire ses preuves, avec espérons-le, un script plus fouillé, des interprètes au diapason et des protagonistes dignes d’intérêt.