Constantine

Constantine

Il y a vingt ans, John Constantine est mort l'espace de quelques secondes. Revenu à la vie avec le don de voir anges et démons, il apprend que ceux-ci ne peuvent apparaître aux humains selon un accord commun mais qu'ils sont susceptibles de les influencer. Constantine va utiliser sa faculté d'extralucide pour traquer les suppôts de Satan violant ce traité, en les réexpédiant tout droit en enfer. Un jour, alors qu'il aide Katelin Dodson, une femme flic, à enquêter sur le suicide mystérieux de sa sœur jumelle, il découvre que moult démons hantent désormais les sous-sols de Los Angeles. Mais que diable préparent-ils ?

CONSTANTINE | CONSTANTINE | 2005

Avec Constantine, Keanu Reeves poursuit son incursion dans le monde de la science-fiction après, notamment, le cybernétique "Johnny Mnemonic" et le raz de marée "Matrix". Autant dire qu'il était attendu au tournant et par ses fans, habitués aux films de genre, et par les adulateurs du comic book américain assez controversé «Hellblazer». Pourquoi controversé ? Eh bien tout simplement parce que John Constantine n'est pas ce que l'on peut appeler un héros ordinaire. Ce serait plutôt l'inverse, ce personnage étant en effet un solitaire notoire, très arrogant et dédaigneux vis-à-vis de ses semblables, fumant sans vergogne clope sur clope et ce, où bon lui semble mais accomplissant son job de nettoyeur de monstres venus des enfers tel un pro. C'est donc à l'antihéros politiquement incorrect par excellence auquel nous avons affaire ici, agissant tel un arbitre entre le camp des anges et celui des démons. Antihéros qui n'hésite d'ailleurs pas à exorciser certains patients retors tel un Père Karras (cf. "L'exorciste" de Friedkin) des familles pour renvoyer les indésirables ad patres et maniant avec dextérité une arme pour le moins originale : un semi-automatique en forme de crucifix !?

Alors le beau Keanu va-t-il se montrer à la hauteur de certains de ses précédents rôles à l'instar du Néo de "Matrix" ? Eh bien en fait pas trop, le sieur Reeves campe sans brio un héros suffisant mais il le fait sans profondeur, trop monolithique à mon goût. L'acteur aux origines hawaïennes, anglaises et chinoises n'offre malheureusement pas l'épaisseur nécessaire au passage sur pellicule du personnage cynique venant de la BD. Cela étant, est-ce que Nicolas Cage, un temps pressenti pour le rôle sous la direction de Tarsem "The cell" Singh, aurait été un meilleur John Constantine ? On est en droit de le penser car si on fait exception de "Ghost rider" et "Prédictions", le neveu de Coppola à la ville nous a, par le passé, gratifié de performances à la hauteur des espoirs mis en lui et surtout, il semblait mieux correspondre au personnage sardonique de la bande-dessinée. En effet, précisons que l'antihéros du comic-book "Hellblazer" est blond à la base, dans la lignée de Sting, dont les auteurs se sont inspirés pour les dessins. Alors qui sait si ça n'aurait pas été mieux ?

Pour le reste du casting, notons que Shia LaBeouf interprétant l'assistant de Keanu Reeves, Rachel Weisz jouant la femme flic et Djimon Hounsou comparse neutre de Constantine, ne sont vraiment pas à leur avantage, se limitant parfois au simple rôle de faire-valoir et c'est bien dommage. Toutefois, tous les personnages secondaires ne sont pas laissés pour compte. Tilda Swinton ("Vanilla sky", "Le monde de Narnia") dans le rôle de l'archange Gabriel devenu pour l'occasion hermaphrodite et Peter Stormare ("Bruiser", "2001 maniacs") campant Lucifer, sortent véritablement leur épingle du jeu en relevant un peu l'interprétation, le pire est donc évité côté distribution, ouf !

Ayant à son actif plusieurs vidéo-clips musicaux pour Britney Spears et Aerosmith notamment, le réalisateur Francis Lawrence s'est présenté devant les producteurs avec de nombreuses idées pour nous offrir un spectacle aux couleurs gothiques et à la photographie hyper léchée. Tellement investi par le projet, le cinéaste de "Je suis une légende 2007" a passé en revue différentes représentations picturales de l'enfer, notamment celles de Bosch et Bruegel, afin de représenter les limbes démoniaques le mieux possible si tant est qu'on puisse le faire puisque jusqu'à maintenant, personne n'en est revenu pour témoigner !


De plus, la direction artistique de Lawrence est sublimée par des effets spéciaux vraiment performants (cf. les ailes de l'archange Gabriel, la première apparition de Lucifer, les scènes de l'exorcisme et de l'hôpital, la descente de Constantine aux enfers et le look des mangeurs d'âmes réalisés à partir d'un prototype conçu au sein de l'atelier de Stan Winston, si ça, ce n'est pas une référence de qualité madame !) toujours au service d'un rythme linéaire, certes, mais ne faiblissant jamais.

On pourra cependant reprocher au film son scénario fourre-tout des plus classiques, car tout semble déjà vu, que ce soit les références à des rites connus, une bigoterie de bas étage ou bien les leçons de moralité sur le Bien et le Mal ou encore la nocivité des cigarettes. Cela sent donc le réchauffé et le spectateur aguerri ressentira fermement une absence de surprise et de suspense à même de le faire changer de DVD à la faveur d'un classique de référence du genre "La malédiction". Mais bon, sans être transcendant, le métrage se laisse quand même bien regarder si on n'est pas trop exigeant car avouons-le, il ne suscite l'ennui à aucun moment même s'il ne provoque pas non plus l'extase.


Ainsi, deux bons acteurs secondaires, des effets spéciaux convaincants, une direction artistique surprenante de la part d'un ancien réalisateur de clips vidéo ne parviendront pas à faire oublier un sentiment général de déjà-vu et la faiblesse d'un scénario, sorte d'assemblage maladroit des différents volumes du comic book original. Constantine est donc un film bancal qui laisse entrevoir toutefois quelques scènes de bravoure aux trucages généreux et le potentiel prometteur de Francis Lawrence, un réalisateur à suivre.

CONSTANTINE | CONSTANTINE | 2005
CONSTANTINE | CONSTANTINE | 2005
CONSTANTINE | CONSTANTINE | 2005
Note
3
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Vincent Duménil