Affiche française
BURIED | BURIED | 2010
Affiche originale
BURIED | BURIED | 2010
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Buried

Buried

Paul Conroy, un trentenaire américain est camionneur en Irak et livre du matériel pour la CRT, une société privée. Son convoi a été attaqué et il semble y avoir échappé indemne. C'est du moins ce dont il se rend compte en se réveillant dans un cercueil. En effet, c'est dans cette caisse capitonnée en bois qu'il se trouve désormais, muni d'un briquet, d'une flasque et d'un téléphone portable ne lui appartenant pas. Il va donc devoir se concentrer à propos de l'utilisation maximale qu'il pourra faire de ces trois objets et ce, dans un laps de temps limité, l'oxygène se raréfiant dans son tombeau. Découvrira-t-il alors pourquoi il se retrouve six pieds sous terre quelque part, en plein désert iraquien ? Et aussi pourquoi on lui a laissé des ustensiles mais vidé intégralement son portefeuille ? Mais surtout, sortira-t-il vivant de cette tombe faite de planches ?

BURIED | BURIED | 2010

Après "Frayeurs" de Lucio Fulci, "Oxygen" de Richard Shepard , "Kill Bill", et l'épisode "Jusqu'au dernier souffle" de la série Les experts ("CSI") tous deux réalisés par Quentin Tarantino, voici une nouvelle pellicule tenant lieu et place dans un cercueil, sauf qu'ici, le tour de force est de taille : c'est le seul décor du film pendant près d'une heure trente ! Loin de reprendre l'exemple de ses prédécesseurs susmentionnés, Rodrigo Cortés, le réalisateur, cite volontiers Hitchcock dans ses références. C'est en effet le huis-clos "Lifeboat" du maître du suspense britannique qui lui a servi de principale source d'inspiration. Il reprend la même recette, à savoir : peu de personnages (neuf chez Alfred, un chez Cortés) dans un unique lieu (un canot de sauvetage pour l'anglais, un cercueil pour l'ibérique), ce qui favorise la montée de la tension psychologique car les personnages sont confrontés à leurs propres angoisses. Mais est-ce qu'ici avec le minimum syndical niveau casting et décorum, ça marche ?

Pour ceux qui, comme moi, ne connaissaient pas Rodrigo Cortés, il s'agit ici de son second long-métrage après la comédie noire "Concursante" avec Leonardo Sbaraglia ("Intacto", "Les proies") et quelques courts, autrement dit un gars au C.V. léger. Pourtant, le lascar est hardi, c'est le moins que l'on puisse dire. C'est muni d'un petit budget qu'il va se lancer dans la réalisation de son film en moins de 17 jours, se déroulant en temps réel avec un seul personnage et dans un seul décor ! Si ça c'est pas avoir des cojones (testicules chez les hidalgos) ! Seulement voilà, il semble qu'il ait une idée, qu'il va faire fructifier en 90 minutes. Certes, réaliser un huis-clos dans un cercueil avec un personnage armé d'un portable est un sacré pari. Alors comment Rodrigo Cortés fait-il pour nous tenir en haleine jusqu'au bout ?

Premièrement, il parvient à susciter une réelle empathie pour Paul Conroy, le héros. Ce dernier est en effet un simple convoyeur venu en Irak travailler pour le compte d'une société privée afin de gagner de quoi nourrir sa famille et qui se retrouve enfermé dans un cercueil alors qu'il n'a rien fait de répréhensible envers qui que ce soit ! Comme lui, on se dit que c'est injuste, qu'il est juste un pion, le dernier maillon de la chaîne qui paie pour toutes les errances du gouvernement US en Irak alors qu'en plus, il participe à la reconstruction du pays (nous sommes en 1996) par le biais de la société qui l'emploie ! Comme lui également, on partage ses angoisses en temps réel : le briquet qui fait des siennes, la jauge du portable qui diminue à vue d'œil, les bruits suspects à l'intérieur et à l'extérieur, etc. Enfin, comme lui, on assiste impuissant à l'inactivité des différents services que le pauvre Paul parvient à joindre au téléphone (l'opératrice des urgences du 911, celle de la CRT, le responsable du personnel de la société…) qui font rarement preuve de compassion et qui, autour de dialogues absurdes, semblent lui faire perdre tout espoir… à moins que…

Deuxièmement, Rodrigo Cortés n'en fait pas trop. Pas trop de musique larmoyante, pas trop de discours moralisateur sur la guerre en Irak (il critique plus, ici, les compagnies américaines sans scrupules prêtes à tout pour s'enrichir, le patriotisme étatsunien et les dangers du tout Internet), pas trop de pathos non plus à travers des situations téléphoniques et des conversations incisives. En jouant habilement sur l'alternance de noir et de lumière grâce au briquet de Paul, il crée une réelle intimité entre le spectateur et le personnage, si bien que jusqu'au bout on y croit, on est tenu en haleine et l'on ne s'ennuie pas une seconde. Un sacré coup de maître en somme !

Ce n'est donc pas pour rien que le film a remporté des récompenses au Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg et au Festival international du film de Catalogne. On n'a pas non plus à être étonné du fait que les producteurs de Lions Gates tellement épatés au Festival de Sundance aient permis à ce petit métrage indépendant de sortir sur bon nombres d'écrans de par le monde…

Mais tout cela ne serait rien sans la performance magistrale de Ryan Reynolds, rendu à coup sûr "oscarisable" pour son interprétation. Le petit ami de Scarlett Johansson à la ville, trouve ici le rôle de sa vie et livre une prestation aux antipodes de ce qu'il a pu nous proposer ces derniers temps. Il est vrai qu'entre des comédies romantiques insipides, des blockbusters décérébrés et surtout "Blade : Trinity" et "X-Men Origins : Wolverine", ça ne volait pas très haut et l'on était très loin de l'Actor's Studio. Heureusement, il se rattrape ici en ne ménageant pas ses efforts (il sortira d'ailleurs du tournage complètement lessivé) et en nous faisant croire à l'histoire de ce pauvre type enfermé dans un espace on ne peut plus confiné qui va tout faire pour s'en sortir et téléphoner à la terre entière. Grâce à lui, on passe par toutes les émotions : la peur, l'espoir, la frustration et surtout la compassion. Formidable ! A star is born aurais-je envie de dire, guidé par mon enthousiasme ! Mais attendons de voir le prochain "Green Lantern", et après on verra pour les superlatifs à trouver pour l'acteur canadien…


Tout comme pour les réalisateurs de "Cube" et de "Saw" en leur temps, Rodrigo Cortés avec peu de moyens mais ce qu'il faut d'idées a su bien s'entourer et faire fructifier un concept en or : son personnage, à l'instar des protagonistes des films précités, est coincé quelque part (ici un cercueil) et va tout faire pour en sortir même s'il ne sait pas comment. C'est simple, mais avec du talent et de la maîtrise, le cinéaste espagnol - porté il est vrai par un formidable interprète - parvient à ménager une tension rare jusqu'au bout et sa conclusion fulgurante. Un film à voir absolument et un réalisateur suivre de très près, assurément !

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Note
5
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Vincent Duménil