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français
Vals sanglante
Vals sanglante
Verena, Katrin, Beatriz, Micha...
La quête éternelle d'amour, de pouvoir, de beauté...
Un Moyen Âge de pestilence et de superstitions. Un établissement thermal à la pointe de la médecine anti-âge du XXIe siècle...
Hommage à la légende de la comtesse Elisabeth Báthory, Vals sanglante entraîne des femmes liées par le sang dans sa danse macabre, dans une Valise thermale et sadique. Entrez dans la danse, voyez comme elles dansent ! Souffrez, criez, sacrifiez qui vous voudrez !
L'AVIS :
Ce qui est incroyable avec Violaine de Charnage, c'est qu'elle réussie à chaque fois à me surprendre. Même si je n'ai pas tout lu de cette autrice talentueuse, mes lectures de Slasher island, Les Entrailles de l'horreur ou Mort de citrouille m'ont à chaque fois fait comprendre que Violaine est une autrice multiforme, j'entends par cela qu'elle a une faculté à se fondre dans le sujet qu'elle traite sans jamais se répéter et en proposant un style d'écriture propre au récit qu'elle raconte. C'est assez difficile à expliquer mais je trouve qu'elle parvient à se renouveler sans cesse, je redécouvre Violaine de Charnage à chaque nouvelle parution. On sait qu'on lit du Violaine de Charnage mais c'est une nouvelle facette de son écriture qu'elle propose. Atmosphère putride et dégénérative pour Les entrailles de l'horreur, ambiance Sea, Sex and Gore pour Slasher island et approche halloweenesque pour jeunes enfants et adolescents pour Mort de Citrouille, difficile de nier qu'elle a plusieurs cordes à son arc madame Violaine de Charnage !
Quand j'ai appris qu'elle allait signer un récit chez l'éditeur suisse Gore des Alpes, qui plus est en rapport avec la célèbre comtesse Elisabeth Báthory, j'ai tout de suite pensé que ça allait saigner grave, que ça allait être de la boucherie sanguinolente sans tabou aucun dans un style fun et décomplexé. Et bam. Tout faux. Enfin presque.
Tout faux au niveau du style en tout cas. Rien de fun, de décomplexé. Pour moi, Vals sanglante est doté d'une réelle maturité d'écriture. Ce n'est pas que les précédents ouvrages publiés n'en possèdent pas, mais je ne sais pas, dans celui-ci, ça m'a particulièrement frappé, que ce soit les tournures de phrases, le choix des mots, leurs agencements, la façon de faire progresser le récit à travers divers personnages, les thématiques abordées. C'est toujours difficile à expliquer ce qu'on ressent avec les œuvres de Violaine mais clairement, avec ce Vals sanglante, elle a encore grimpé d'un niveau.
Original, Vals sanglante l'est, assurément. L'histoire nous embarque dans différentes décennies, on navigue du Moyen-Âge aux années 80 en passant par la décennie 2010's et tout s'imbrique délicieusement. Je croyais au départ qu'on allait nous raconter une histoire dont la comtesse Báthory serait l'héroïne mais pas du tout, même si son ombre, son empreinte, sera bel et bien présente, il suffit de regarder la superbe illustration ornant la couverture du roman. Composé de sept chapitres, Vals sanglante nous entraîne à la suite de Verena, de Katrin et de Beatriz. Trois femmes, trois époques différentes, mais dont chacune va interagir avec l'autre, d'une manière ou d'une autre. En lisant le chapitre consacré à Verena, situé au Moyen-Âge, je me suis dit que ce roman était en fait un recueil de nouvelles car je ne voyais pas comment rattacher cette histoire jouant avec la légende du vampire, à l'époque contemporaine. Mais pas du tout. La maîtrise de l'autrice de son sujet fait qu'on retrouve ce personnage dans le chapitre consacré à Katrin, la véritable héroïne du récit. Enfin, héroïne, il faut le dire vite. Ses exactions futures, et elles seront nombreuses, vont nous faire voir d'un œil différent cette petite fille devenue médecin, et qui ne rêve que d'une chose : trouver le secret de la jeunesse éternelle. Quitte à oublier le fameux serment d'Hippocrate pour y parvenir. Son lieu d'étude, dans lequel elle peut mener ses curieuses recherches : le centre de cure thermale de Vals. Un endroit où va se rendre Beatriz, ancienne actrice populaire qui voit sa carrière s'effondrer avec le temps qui passe et qui l'enlaidit. Ça y est, vous voyez le rapport entre ces trois personnage et la comtesse Báthory. Elle est forte Violaine, non ?
Petit à petit, dans un style instinctif, vif, prenant, les rouages de ce drame sanglant se mettent en place et l"horreur apparaît par petites touches. Une horreur chirurgicale, maladive, prenant part dans un esprit torturé, celui de Katrin Tobler, qui n'a rien à envier au docteur Mengele ni aux expériences menées dans le camp 731 japonais. Même si Vals sanglante ne verse pas dans le gore outrancier, que Violaine fait même preuve d'une certaine retenue à ce niveau - et c'est tant mieux dirais-je car il était trop simple de faire du gore pour du gore avec le cas Báthory - on ressent un malaise naître en nous au fil de la lecture et plus les pages se tournent, plus les agissements de Katrin deviennent malaisants pour le lecteur. On appréciera bien sûr le clin d'oeil à la scène culte du "Hostel chapitre 2" d'Eli Roth, il était impossible de ne pas avoir une scène de baignoire ici, si vous voyez de quoi je parle. Insidieuse, l'horreur proposée par l'autrice dans Vals sanglante est feutrée tout en restant dérangeante. C'est là toute la puissance de ce récit.
Encore une fois, Violaine de Charnage m'a donc surpris et pris à contre-pied. C'est pour moi son texte le plus abouti - je n'ai pas encore lu son dernier ouvrage en date, Un conte de neige et de mort - et j'ai littéralement dévoré les 98 pages de ce roman. Tout est maîtrisé, mûrement réfléchi, superbement écrit, et ça atteint sa cible sans difficulté aucune. Coup de cœur pour ma part.