Leatherface (2017)
Leatherface
Accusé du meurtre de la fille du sheriff, le petit garçon, qui deviendra un jour Leatherface, est interné dans un hôpital psychiatrique. A l’adolescence, il arrive à s’échapper à la suite d’une mutinerie et, accompagné d’autres patients psychopathes, il prend un otage une infirmière. Les cinq compagnons d’infortune partent en cavale pour se rendre au Mexique poursuivis par le sheriff et son équipe. Va s’en suivre un carnage…
L'AVIS :
Il y aurait plusieurs façons de chroniquer ce « Leatherface ». La première, la plus objective et honnête vis-à-vis du spectateur, serait d’écrire sur le film en lui-même, sur ces 1h30 de sauvagerie tranchée dans le vif par les producteurs. La seconde, plus sympathique envers les réalisateurs, serait de juger une version reconstituée avec les scènes coupées et alternatives afin de se faire un montage de la version prévue par Maury et Bustillo. Autre méthode, on pourrait le comparer et l’intégrer avec les autres films de la saga « Massacre à la tronçonneuse » pour voir à quel niveau il se situe. Si on le compare avec le film original de Tobe Hooper et qu’on le prend pour la préquelle de celui-ci alors, forcément et inévitablement, « Leatherface » va souffrir. Malgré toute l’application du monde à rendre crédible les paysages bulgares pour les faire ressembler au Texas et à ajouter des détails morbides, on est loin de l’atmosphère anxiogène et du réalisme écœurant du chef-d’œuvre de Hooper. Cependant, si on intègre « Leatherface » dans la saga complète, il arrive rapidement dans la première moitié du classement, derrière les deux premiers films et, peut-être aussi, juste après le remake efficace de Marcus Nispel en 2003. Bref, on pourrait essayer de classer « Leatherface » sur différentes échelles et le comparer plutôt que l’évaluer en tant qu’œuvre unique et se suffisant à elle-même.
Rappelons d’ailleurs que c’est un peu le bordel dans la chronologie des huit films ! Il y a d’abord les quatre premiers puis le remake du premier suivi de la préquelle du remake. Ensuite, il y a l’épisode 3D qui prétend être la suite directe du premier film en occultant complètement tout le reste et enfin ce huitième film qui se veut être la préquelle du film original. En gros, c’est un peu une saga à choix multiples ! Faites votre sélection et constituez la saga qui vous plaît ! Et donc, cette chronique va plutôt vous conseiller de choisir le film de nos frenchies Maury et Bustillo dans cette sélection.
Maintenant que je suis retombé sur mes pieds, je vais donc (enfin) parler du film, qui je dois dire, ne fait pas l’unanimité au sein de la rédaction d’Horreur.com. Mais comme on m’a confié la mission d’en écrire quelques mots, alors je l’accepte avec grand plaisir ! Et vu qu’on m’a aussi dit qu’il fallait que je chronique le film et uniquement le film que j’ai vu et pas ce qu’il aurait pu être (hein, David ?!) alors c’est parti !
L’introduction du film, le repas de la famille tronçonneuse, met tout de suite dans l’ambiance. Bien que les rires surjoués des membres de la famille de dégénérés et les plans larges fassent un peu « fake », le plaisir est tout de même présent dès que le gore s’invite à table. A cet instant, on retrouve la patte des auteurs de « A l’intérieur » et « Aux yeux des vivants » avec de la violence frontale et des effets chocs dont on connait leur goût. Ce type de séquence brutales, réalistes et/ou morbides viendront agrémentés le récit tout du long et sauront se montrer suffisamment choquantes pour marquer le spectateur après le générique. Mentions spéciales à l’agression dans l’asile et ses lumières stroboscopiques, au cassage de bouche tendance « American History X » et à la scène de sexe nécrophile.
Mais il n’y a pas que la violence dans « Leatherface », il y aussi le road trip et l’aventure funèbre de ce groupe d’adolescents dans lequel les personnages existent et ne sont pas seulement des jeunes voués à une mort violente. Leur parcours ressemble à une version tarée des enfants de « Aux yeux des vivants » dans laquelle les rôles seraient inversés. Si l’empathie pour nos jeunes héros n’est pas forcément optimale, l’intérêt pour leur destinée est lui bien présent. Et quand la police vient à les retrouver, on ne sait plus exactement dans quel camp on est. Dans « Leatherface », personne n’est tout noir ni tout blanc… et surtout pas blanc. Chaque personnage est interprété avec conviction par des acteurs investis. Des plus confirmés (Stephen Dorff à Lili Taylor) aux plus novices, tout le monde se démène dans ce décor de sang et de poussière.
Niveau scénario, rien de bien neuf sous le soleil (texan) de l’horreur même si cette aventure sort du schéma classique des « Massacre à la tronçonneuse ». A part ça, que du plus ou moins déjà vu : de la famille maniaque à l’asile, de l’évasion au choc qui transforme un « bon gamin » en psychopathe, tout semble déjà avoir été dit dans d’autres sagas (comme « Halloween », par exemple). Ce qui vient épicer ce classicisme sont la réalisation haut de gamme du duo (photographie impeccable, cadrages bien choisis, fourmillement d’idées visuelles) et d’éléments malins (oui, ok, ça va, je me suis fait avoir par le petit twist !). Moins malin et surtout moins bien amené, le changement brutal en « Leatherface » du « héros ». Certes, le maquillage et la démarche sont crédibles par rapport au personnage mais sa transformation psychologique est, quant à elle, amené avec des gros sabots et laisse sur sa faim. Surtout que c’est l’intérêt principal de cette préquelle et la raison du visionnage. S’ensuit un final rondement mené à la limite de l’expédié qui apporte son lot de gore mais une conclusion un peu trop attendue et facile. A noter, pour l’anecdote, que dans le Bluray, vous pourrez trouver la fin alternative qui change légèrement en apportant une touche un peu plus poétique (qui n’a pas plu aux producteurs).
D’ailleurs, dans le Bluray, vous trouverez aussi moults séquences additionnelles et une interview passionnante des réalisateurs qui expliquent que leur bébé a été amputé d’une bonne demi-heure par les producteurs et que des re-shoots ont été faits pour effectuer les transitions manquantes causés par le retrait de ces trente minutes. Maury et Bustillo, un peu déçus mais bons joueurs, admettent volontiers qu’ils étaient au courant de ce risque de troncage par la production lors de la signature du contrat. Oui, j’avais dit que je parlais que du film mais désolé, c’est plus fort que moi !
Finalement, même dans sa version courte et « bâclée », « Leatherface » garde la patte sans concession de ses auteurs au travers de ses personnages travaillés et de cette violence frontale et dérangeante.
D’ailleurs, on reconnait clairement le style des deux réalisateurs alors si vous n’avez pas accroché à leurs précédents efforts, peu de chance que celui-ci vous plaise, tout « Massacre à la tronçonneuse » qu’il soit.
Ceci étant dit, les intentions d’auteurs du film l’emportent donc in extremis sur la vision limitée du cinéma d’horreur des producteurs et permettent à « Leatherface » de pavoiser bien au-dessus d’une majeure partie des épisodes de la saga. Dommage que les coupes franches rendent le métrage bancal et finalement un peu vain quant à l’explication de la genèse du mythe.
En attendant que le film soit peut-être totalement réhabilité avec une version « Director’s cut », jetez tout de même un œil à cet opus qui s’il démérite par son scénario vaut pour ses idées visuelles multiples, son jeu d’acteur convaincant et sa radicalité.