Moi zombie : chronique de la douleur
I zombie : chronicle of the pain
Nous sommes en Angleterre : après une dispute avec sa petite amie, Mark se rend dans le coin de campagne le plus proche pour y relever quelques spécimens, ayant entamé justement une thèse pour ses études de botaniques. S’engouffrant dans un bâtiment apparemment à l’abandon, il y découvre le cadavre d’un homme en piteux état et une jeune femme mourante, dont le corps est secoué de violents spasmes. Il décide de la sauver, et la porte à l’extérieur : elle le mord sauvagement.
Depuis ce jour, plus personne ne sait ce qu’est devenu le jeune homme. Nous spectateurs, allons le découvrir…
Un film d’horreur peut-il être émouvant ?
Oui bien évidemment, en particulier lorsqu’il touche à des thèmes davantage liés au drame : l’amour, la solitude ou la maladie par exemple. Ainsi quelques thèmes classiques du genre ont été arrangés et modernisés, cédant à une vision plus réaliste pour mieux illustrer la dégénérescence mentale et (surtout) physique ; ce que nous a prouvé des excellents films comme "Martin" ou "La sagesse des crocodiles" pour les vampires ; "may" et "la mouche" pour le thème de Frankenstein pour l’un et de La belle et la bête pour l’autre, ou "le mort-vivant" pour les zombies. Pour ces derniers, il faudra attendre 27 ans après le petit chef d’œuvre de Bob Clark pour avoir un nouveau film sur le sujet traité comme tel : le fabuleux I Zombie.
S’ils n’ont rien de fantastiques quant à eux, des films comme "kissed", "Dans ma peau" ou "Crash" parlent aussi de mal-être et de personnages rongés par leurs obsessions mortifères. On n'oubliera pas non plus des titres comme "possession" ou "le locataire" : bref (et il vaut mieux couper court sinon on n’en finirait jamais !) voilà tout ce qui représente la crème de ce que l’on peut qualifier de "drame horrifique". Le film de Parkinson les rejoint sans problème, et avec un budget riquiqui qui plus est !
Une œuvre présentant un regard neuf et fort sur le zombie, après des années de parodies et de séries Z plus ou moins casse-burnes, et en plein cœur de la période la plus morne de notre cinéma préféré. Pari risqué mais réussi (pas pour tout le monde me dit-on, puisque le film serait un sommet d’ennui pour certains…).
Après une ballade champêtre qui tourne mal, le jeune Mark se reclus dans une petite maison en ville, tirant un grand trait sur sa vie passée. Si son âme est encore là, malgré des pulsions cannibales inévitables, le corps de Mark est mort…ou en tout cas se meurt à petit feu. Inutile d’aller chercher à savoir si une invasion de zombies s’apprête à toucher l’Angleterre, Parkinson se focalise entièrement sur son héros, allant jusqu’à parsemer son film de fausses interviews de ses proches (d’ailleurs rapidement répétitives) et de cauchemars assez impressionnants (mention spéciale au zombie de la forêt ou le sous-sol infesté de macchabées ambulants), suivant son horrible agonie et faisant du spectateur le témoin d’une vie qui tombe aussi bien en lambeaux que la chair du dit zombie.
Plus près du monstre : un concept rappelant celui du glauquissime "schizophrenia - le tueur de l ombre", qui lui était carrément en temps réel. Ce qui fait cependant la joie de l’amateur de gore, c'est-à-dire les fringales du mort-vivant, cela n’intéresse visiblement pas Parkinson. Les attaques se limitent à des coups de chloroformes dans le nez, et quelques plans cradingues montrant Mark se repaitre de la chair de ses victimes, bien malgré lui. Et si vous espérez voir des tripes repeindre les murs et les membres virevolter, vous vous êtes trompés de film…
Drogue, Sida, Cancer, dépression : il est clair que le cas de zombification traité ici peut être assimilé à bien des choses connues et terribles de notre monde moderne. Mark se retire de son ancienne vie, évite tout contact humain, mais tentera tant bien que mal de retrouver sa compagne, dans une scène bercée de désillusions. Vie sans amour, sans plaisir, sans beauté, sans personne : la véritable horreur donc…
Parkinson ne nous épargne rien de la décomposition de son héros avec spasmes, apparitions de plaques sur différentes parties du corps, pertes de cheveux ou teint de peau perdant de sa couleur au fil des jours : le corps, mort, peut même être bricolé comme le prouve cette scène de "réparation" du tibia. La fusion chair/métal, traumatisante, poussera même le héros à imaginer des visions dignes de "Tetsuo", qui on le rappelle, parlait aussi de dégénérescence physique extrême.
Malgré un aspect amateur - finalement pas si rebutant que ça puisqu’il donne un cachet documentaire au long-métrage, et donc d’autant plus terrible – les maquillages n’en sont pas moins très réussis, et l’interprétation particulièrement convaincante (espérons que l’acteur principal s’est bien remis de son rôle !), quant à la superbe Ost (bien que des passages au synthé soient assez discutables) elle enfonce le clou, avec ses accords de guitare mélancoliques à souhait.
Mélancolie…et là tout est dit à propos du film d’Andrew Parkinson, qui remettra le couvert avec "dead creatures", où il suit cette fois le parcours d’un groupe de jeunes femmes en pleine zombification ; et que dire aussi de "zombie honeymoon", qui n’a pas hésité à prendre la même voie que le film de Parkinson !
Ce I Zombie est sans conteste la plus pathétique et la plus bouleversante histoire de zombie que nous ai offerte le cinéma de genre. A éviter les jours de déprime cela va sans dire…