Maniac trasher
Dark asylum
Encore une purge écrite et réalisée par la même personne? Il faut dire que ça coûte moins cher au producteur... Quant à savoir si ça lui rapporte... On s'étonne quand même de voir Lions Gate chapeauter ce produit pas innovant pour un sou, déjà tarte sur le papier, menteur sur le contenu et joué au tarif syndical par des acteurs de troisième zone. Mais il est vrai que la maison n'avait pas encore pris le virage monstrueux des alentours 2004, et après tout personne n'est parfait. Gregory Gieras encore moins que les autres.
Un tueur sévit dans les ruelles pleines de détritus. Un écorcheur. On retrouve des morceaux de viande un peu partout, sans pouvoir mettre la main sur les corps. C'est affreux, la terreur règne, la télévision le dit et le répète. Et ce soir, voilà que ça recommence! Mais la loi ne restera pas longtemps impuissante: prenant en chasse un chauffard, des policiers finissent en effet par tomber sur l'antre du maudit tueur... Après bien du malheur, elle arrive même à le neutraliser, et le transfère illico presto dans un vieil hôpital psychiatrique, prétendument sécurisé. Une doctoresse est aussitôt chargée d'expertiser l'ignoble boucher; on va l'analyser, l'enfermer, le griller, oui oui oui, mais... non, finalement. Car pas de bol, il parvient à se détacher.
S'il y a une chose qui vous plombe un film en moins de deux, c'est bien la fausse annonce. Et quand on vous parle d'un "écorcheur" (trasher, trasher, trasher, répètent les infos) qui dézingue ses victimes en répandant des lambeaux partout dans les ruelles, alors qu'il s'avère en réalité passer son temps à défoncer les cloisons et à étrangler ses proies en leur serrant le kiki pendant deux secondes, forcément, le désenchantement vous saisit. Ce ne sont pas les bruitages elliptiques d'oesophages broyés qui arrangeront notre affaire... D'ailleurs, hormis quelques impacts par balle, tout se fait à l'ellipse dans "Maniac Trasher". Pas de moyens pour payer des maquilleurs, semble-t-il. Question meurtre, vous ne verrez donc rien: deux cadavres barboteurs (qui ont l'air bien entiers) dans l'antre creepesque du tueur, au début, et une clef légèrement teintée de sang, à la fin. Bouh.
Le tueur? Imaginez le bibendum Michelin pourvu d'un regard vicieux, et vous aurez compris de quoi il a l'air dans sa camisole de force. Avec son crâne d'oeuf, sa bouille lippue, on croirait voir un gros bébé aux lèvres fraîchement débarbouillée de compote Bledina. Du reste, il geint lorsqu'il n'arrive pas à attraper les clefs à travers les barreaux, exactement comme un môme dans son lit-cage quand il a fait tomber nounours sur la moquette. Notez quand même qu'il porte bien son prénom, Luther, si on le prononce à la française... Tant il est vrai que les lutteurs et autres catchers, dont il aurait pu faire partie, ressemblent eux aussi à de gros poupons en colère.
Pour le sang et l'effroi, ceinture donc. Mais vous pouvez la serrer encore, car côté suspens, acteurs et tout simplement réalisation, il n'y a rien d'autre q'une grande platitude... et même des goufres. Passé l'introduction où il est possible de se dire qu'on va s'amuser un peu (la découverte de l'antre du tueur est honnête), toute illusion s'évanouit une fois que Gregory Gieras nous emmène dans l'hôpital psychiatrique désaffecté. C'est un peu comme si "Le silence des agneaux" stagnait dans sa première partie, avec Larry Drake à la place d'Anthony Hopkins, Jürgen Prochnow dans le rôle du Dr Chilton et une actrice pire que Jodie Foster pour jouer les Starling. Le méchant s'échappe, tout le monde est bouclé dans l'hôpital, et on joue à cache-cache en attendant le FBI, en se glissant dans des conduits et en jouant avec les talkie-walkie... paaaaassionnant!
C'est alors que l'esprit sacré du nanar tente péniblement de s'emparer de la pellicule et de distribuer ses épiphanies: un chef de la sécurité tire à bout portant sur un otage, puis son fusil à pompe s'enraye; Luther Wells se prend un gamelle à la Laurel et Hardy en essayant de se hisser dans le faux plafond; un débile aux réparties drôlissimes surgit pour aider la psychiatre: "Où il est ce monstre? Où se cache-t-il?"; on nous révèle que tout l'entourage familial de la psychiatre était profondément atteint du ciboulot, ce qui explique peut-être qu'elle soit tentée un instant de sauter de cinquante mètres pour attérir sur une voiture, avant que son ange gardien ne le lui déconseille; et des clins d'oeil pleins de cataracte surviennent, comme celui à "Vol au-dessus d'un nid de coucou": "C'est l'heure des médicaments. J'arrive... Ah ah ah, vous allez avoir votre dose, Maggie". On peut ensuite fouiller en détail: par exemple, la voiture qui manque d'écraser "Maggie" à la fin est la même que celle de la course-poursuite du début (notez la plaque d'immatriculation), alors qu'il n'y a aucun rapport entre les deux. Et lorsque le tueur retourne dans son antre, ce dernier présente l'énorme avantage de n'être pas gardé par la police, qui a tout laissé en l'état. Pratique.
Triste constat. Malgré les bêtises parsemées ici et là, "Maniac Trasher" ne présente rien d'assez affirmé pour pouvoir prétendre récolter quelque étoile spécifiquement réservée aux objets issus des contrées du Z. Soft, poussif, mensonger, idiot sans aucune envergure, la note qu'il mérite ressemble en tout point à la tête de son maniaque massif et contondant: un beau zéro.
* Connu également sous le titre alternatif: "Return to death row".