Loved ones - the
The loved ones
Après un accident de voiture qui aura coûté la vie à son père, Brent n'a plus la foi de surmonter les problèmes de son existence, bien qu'épaulée par une douce et superbe petite amie. Alors que la fameuse "Prom Night" approche, il refuse l'invitation de Lola une jeune fille timide dont il a plutôt l'habitude d'ignorer l'existence. Quelques heures avant le bal, Brent est capturé par une silhouette sombre, qui va l'embarquer pour une nuit entière de cauchemar...
Après s'être fait la main sur une poignée de courts-métrages, Sean Byrne peut être fier de sa première monture cinématographique au format long, une véritable bête de festival comme on peut l'entendre dire. L'Australie a encore quelques traces de l'âge de l'Ozploitation dans le gosier et elle nous le prouve...
Ce qui surprend aux premiers abords dans "The loved ones", c'est sa forme, qui fait preuve d'une fluidité et d'une rigueur à toutes épreuves : les images, tournées en caméra HD, épousent un Scope nostalgique (une grande partie des séries b de la Ozploitation étaient ainsi), balayant les rues doucement éclairées et le bush australien avec style. Un regard sensible qui, plus tard, se confondra avec une violence hystérique bienvenue, tendance éruptive et explosive.
A travers cinq figures adolescentes, Byrne tourne autour du difficile passage à l'âge adulte et ses manières d'y répondre : on se marginalise pour mieux se voiler la face (comme Brent, l'autodestructeur et Mia, son pendant féminin), pour mieux se libérer de l'angoisse du deuil, on répond simplement à ses montées d'hormones (comme le sympa Jaimie) ou plus loin on tombe tout simplement amoureux. Lola, petite fille trop grande à première vue, est une exception : ses troubles adolescents ne peuvent s'exprimer que dans des fêtes annuelles dégénérées de strass et de sang, où elle prend les rennes de la Prom Night en l'a recréant dans son propre salon, le tout dans une atmosphère évoquant plus "Massacre à la tronçonneuse" que Rose Bonbon et le tout chaperonné par Papa (aussi timbré) & Maman (réduite à l'état de zombie).
Imaginaire candide distordue, torrent de roses et œdipe mal réglé ; le monde de Lola fait doucement rigoler dans ses aspects extérieurs mais dérange profondément dans sa morale scabreuse : ce bal de l'horreur est devenu une habitude comme une autre pour la jeune fille, dont on ignorait la perversité démentielle. Dans sa robe satinée et pimpante, la jeune Robin McLeavy y est aussi mignonne (malgré) que (surtout) terrifiante.
Quelque part entre les turpitudes des adolescents de John Hughes et la sauvagerie de "Wolf Creek", The loved ones a quelques fois du mal à s'extirper d'une structure devenue balisée dans le cinéma d'horreur (le film de séquestration) mais bouscule dans sa manière d'effleurer les genres (teen-movie, drame, torture porn et survival) et dans son grain de folie grandissant. On pense parfois au très sordide "Mum & Dad" mâtiné d'un rien de "All the boys love Mandy Lane", dont le ton est parfois très similaire.
Byrne a tout de même la main pour mettre nos nerfs en miettes lors de scènes de sévices pourtant peu sophistiquées (menace au marteau, torture à la fourchette, cloutage de pieds) mais ô combien douloureuses. Dire qu'on se souviendra encore de l'utilisation abusive du sel ou de la perceuse par Lola relève de l'euphémisme pur et simple. Et ce n'est pas parce qu'il caresse les cicatrices adolescentes, que Byrne s'y retrouve piégé : son film prend l'allure d'une tornade outrancière dans une dernière partie qui réveillerait sans doute un mort. Là où "Teeth" (ni effrayant, ni vraiment drôle, et donc bancal) et "Jennifer's Body"(trop sage) échouaient, The Loved Ones se lâche sans retenu. En voilà un qui mérite bien sa petite couronne.