Ile du dr. moreau - l (1996)
Island of dr. moreau - the (1996)
Le fameux roman de Wells aura droit à quelques adaptations sur grand écran dont une non officielle (le méconnu "Terror is a man"). D'abord en 1933, avec "Island of lost souls" de Erle C.Kenton puis en 1977 avec une adaptation de Don Taylor assez agréable, dont les maquillages sont signés John Chambers (les singes de "La planète des singes", c'est lui). Mais en 1996, la New Line nous balance en pleine figure une nouvelle version de "L'île du Dr Moreau", se vautrant dans le ridicule le plus total. L'histoire est bien sûr la même : un naufragé débarque malgré lui sur une île habitée par un mystérieux savant fou, créateur d'une race d'humanimaux, qui en profitent pour se révolter de leur condition.
Grâce à John Frankenheimer, vous pourrez goûter au plaisir de voir le nain le plus affreux de l'histoire du cinéma, de surprendre des humanimaux s'éclatant au piano ou de découvrir un Marlon Brando complètement relooké comme un horrible travelo. Il fallait oser, et Frankenheimer l'a fait pour nous. Seulement, au départ, le film était dirigé par Richard Stanley (réalisateur du fameux "Hardware") mais suite à quelques problèmes, il passera la main à John Frankenheimer, qui devait être sacrement fatigué pour signer un film pareil. Le casting, quoique soigné, ne vole pourtant pas bien loin niveau interprétation : David Thewlis passe de l'halluciné de service au pauvre paumé frappé apparemment d'une légère somnolence, un Val Kilmer complètement à coté de la plaque et un pauvre Marlon Brando, déblatérant n'importe quoi quand il peut, et s'habillant de blanc de la tête au pied lorsque l'occasion le lui permet.
D'ailleurs le personnage du docteur Moreau, ici aussi vif qu'un mort vivant, est bien maltraité, surtout lorsque Marlon Brando s'exhibe dans sa fameuse tenue blanchâtre, se coiffe d'un fez réfrigérant, ou apprend à une poignée d'humanimaux quelques accords de piano. Le pire revient à son assistant, Majai le nain, un nabot à la laideur indescriptible joué par Nelson de La Rosa, qui fut pendant un temps "Ratman". Un personnage dont le physique fera basculer le spectateur entre l'inquiétude (surtout quand Frankenheimer le fout à poil devant la caméra !) et les fous rires incontrôlables. On ne sera pas étonné de voir que "Austin Powers 2" et la série "South Park" parodiera ce personnage qu'on oubliera difficilement. La jolie Fairuza Balk (qui, la même année, jouait également dans "The craft") joue ici le rôle de la fille adoptive du docteur, une jeune fille complexée par une mutation gênante ; un personnage qu'on aurait préféré plus fouillé car plutôt intéressant.
Mais le pompon revient ici à Val Kilmer, sobre pendant une bonne moitié du film, avant de péter littéralement un plomb vers la fin. Le pauvre homme, ayant un peu tiré sur le joint, se retrouve à remplacer le docteur, allant jusqu'à porter le fameux costume de son maître, et organise des orgies avec les humanimaux! On a bien du mal à le croire, mais Frankenheimer a osé!! Et je ne parle même pas de cette scène où David Thewlis tente de le raisonner en lui foutant quelques bonnes claques dans la gueule. Outre l'affreux nain, on croisera même des rats en images de synthèse, se tenant sur leurs deux pattes. Ridicule quand tu nous tiens.
Et dans tout ça, les humanimaux alors ? Et bien là encore, on ne peut pas vraiment dire qu'ils sont bien gâtés. Les maquillages restent simples, oscillant entre l'acceptable et le ridicule. D'ailleurs l'un des plus intéressants, Lo Mai l'homme panthère, ne tient à l'écran que quelques minutes malgré une impressionnante agressivité qui promettait bien pour la suite. Méconnaissable sous le maquillage de Stan Winston, c'est Mark Dacascos qui endosse le costume de la créature. On pourra se rattraper sur l'homme hyène, grand méchant du film, incarné par Ron Perlman, bien habitué aux séances maquillage après avoir incarné un bossu dans "Le nom de la Rose" ou la bête dans la série "La belle et la bête". Dommage que son maquillage soit aussi pataud et lourdaud au bout de quelques minutes de visionnement. Pourtant le sadisme de certains humanimaux est parfois bénéfique au film, même si voir certains d'entre eux prendre les armes vers la fin du film, fait plus penser à "Meet the Feebles" qu'à autre chose. Et voir un serviteur à moitié chien, se trimbalant un faciès pas possible, qui commence à se prendre pour le big bad guy du film, ça fait aussi bien pitié. Et c'est en accumulant les défauts et les idioties, qu'on se rend compte que le film s'est éloigné depuis longtemps du matériau d'origine. Et pour terminer vaillamment son film, Frankenheimer nous assène une réflexion mettant en parallèle la violence des humanimaux à celle des humains, quasi identique. Certes c'est intéressant, mais placée sans crier gare à la fin d'un tel ratage, le spectateur n'en prend pas vraiment compte. Maintenant à vous de voir si le film vous amuse au second degré, parce que sinon, on ne sait pas vraiment quoi en tirer. Et dans le premier cas, "L'île du docteur Moreau" est drôlement bon !